De la créativité à la conformité : la vision d’Adobe pour l’IA générative en entreprise
Avec Firefly Enterprise, Adobe veut concilier puissance de l’IA générative et exigences des grandes marques : sécurité, transparence, personnalisation et qualité.
 
				
			
			
				Alors que l’IA générative s’impose dans les processus créatifs, les grandes entreprises cherchent à l’adopter sans compromettre la sécurité, la qualité ou la cohérence de leur marque. Avec Firefly Enterprise, Adobe veut offrir une IA « commercialement sûre », pensée pour les besoins professionnels. Rajan Vashisht, Senior Director Machine Learning & Firefly Product chez Adobe, détaille pour BDM la philosophie et les choix techniques derrière cette approche, entre personnalisation, gouvernance des données et montée en puissance des usages créatifs.
Pour commencer, pouvez-vous décrire votre rôle au sein de Firefly et la mission de l’équipe Machine Learning que vous dirigez ?
Je suis Senior Director of Machine Learning and Firefly Product depuis un peu moins de deux ans. Mon équipe développe la technologie d’IA générative d’Adobe, à la fois sous forme d’API et à travers des produits couvrant plusieurs modalités (image, vidéo, design, vecteurs, 3D…). Nous construisons aussi les workflows intégrés sur firefly.adobe.com.
Je travaille également avec de grandes entreprises sur des modèles personnalisés, comme ceux présentés récemment autour des usages individuels et d’équipe. Mon rôle consiste à industrialiser la technologie : transformer un modèle entraîné en un produit prêt pour l’inférence et le déploiement, avec des garanties de sécurité, de fiabilité et de contrôle.
Nous concevons des workflows complets qui accompagnent les utilisateurs de bout en bout : génération, importation de médias, édition, partage, signature… L’équipe couvre ainsi l’ensemble du cycle de création, en lien étroit avec l’ingénierie machine learning.
C’est une aventure passionnante. La technologie évolue à une vitesse remarquable. Nous avons commencé par intégrer l’IA générative dans nos produits phares, comme Photoshop avec le workflow Generative Fill, puis avons étendu nos travaux à la vidéo avec Generative Extend, qui permet d’allonger un clip ou un plan b-roll. Notre mission est vraiment de couvrir tout l’écosystème de la création.
En matière d’IA générative, quelles sont les attentes les plus courantes que vous observez chez les marques et grandes organisations avec lesquelles vous travaillez ?
La sécurité commerciale est leur première exigence. C’est le principe fondateur de notre approche. Les entreprises veulent savoir sur quelles données les modèles sont entraînés, s’ils peuvent les utiliser en toute sécurité dans leurs propres workflows, et si les contenus générés sont exploitables sans risque juridique.
La sécurité commerciale est la première exigence des entreprises. C’est le principe fondateur de notre approche.
Mais chaque organisation a aussi ses besoins spécifiques. Un acteur du retail, une marque de biens de consommation ou une entreprise industrielle n’auront pas les mêmes priorités. Certains se concentrent sur la qualité du logo, d’autres sur la physique du mouvement dans les vidéos, la cohérence des visages humains ou la précision des formes, etc.
Notre travail consiste à développer des technologies capables de répondre à cette diversité à travers la personnalisation. Ces 18 derniers mois, cela s’est révélé très fructueux. Nous avons aidé de nombreuses entreprises à générer, éditer et produire des contenus plus rapidement, réduisant ainsi leur time-to-market et améliorant la performance de leur chaîne de production de contenu.
Firefly Enterprise se distingue par son approche de la transparence des données, de la sécurité et de la propriété des contenus. Comment concevez-vous l’architecture du machine learning pour répondre à ces exigences ?
La question des données se pose à plusieurs niveaux. D’abord, lors de leur intégration dans notre écosystème d’entraînement : nous appliquons des contrôles stricts dès le départ et de manière répétée. Nos politiques internes définissent précisément comment nous qualifions les données, qu’il s’agisse d’un modèle créé de zéro ou d’un modèle affiné (fine-tuned, ndlr). Ces mécanismes nous permettent d’affirmer avec confiance que les jeux de données utilisés sont commercialement sûrs.
Les données des entreprises restent totalement isolées : elles ne sont jamais réinjectées dans nos pipelines d’entraînement.
Les entreprises veulent aussi savoir où leurs données transitent et où l’inférence a lieu. Nous avons donc conçu une infrastructure de stockage de niveau entreprise, qui permet à chaque client de charger ses propres contenus pour l’entraînement ou le fine-tuning dans un espace dédié, hébergé dans son pays. Toute personnalisation, tout ajustement de poids est conservé dans cette même région.
C’est une approche essentielle pour respecter nos politiques de résidence des données et rassurer nos clients. Leur contenu reste totalement isolé. Il n’est jamais réinjecté dans nos pipelines d’entraînement. De leur côté, ces pipelines utilisent exclusivement des sources sûres et libres de droits, comme Adobe Stock. Les deux univers, données clients et données de formation, restent strictement séparés.
Beaucoup de marques se heurtent au passage du prototype à l’industrialisation. Quels enseignements tirez-vous des intégrations déjà réalisées avec vos clients ?
La qualité est le point central. Les marques veulent s’assurer que les contenus générés peuvent être utilisés dans leur chaîne de production, avec un niveau professionnel.
Depuis un an et demi, nous travaillons en étroite collaboration avec nos clients dans le cadre de nos offres de personnalisation. Les premiers adopteurs nous ont transmis de nombreux retours, que nous avons intégrés pour affiner nos modèles selon les cas d’usage : types d’images, niveaux de résolution, rendu des formes ou des visages…
Certains clients sont satisfaits de la qualité globale, d’autres demandent une précision accrue pour la génération de logos, l’art vectoriel ou le réalisme des mains et des yeux. Nous avons également des entreprises de télécommunications ou des marques qui utilisent nos outils pour des campagnes de grande envergure, comme pendant le Super Bowl. Certaines recherchent une montée en charge massive plus qu’une amélioration de la qualité, et nous travaillons avec les fournisseurs de cloud pour répondre à ces besoins.
L’innovation en IA générative évolue extrêmement vite. Comment assurez-vous l’évolutivité et la pérennité des modèles Firefly lorsqu’ils s’intègrent dans des workflows créatifs complexes ?
C’est l’un de nos enjeux quotidiens. L’intérêt pour ces technologies est immense, et la demande en puissance de calcul explose partout.
Nous avons pour cela noué des partenariats solides avec les grands fournisseurs de cloud (hyperscalers, ndlr) et nous planifions toujours en avance sur nos besoins pour garantir la disponibilité des ressources nécessaires à nos clients. Adobe investit aussi massivement dans le calcul pour l’entraînement, ce qui nous offre une grande flexibilité.
Nous pouvons ainsi réaffecter rapidement notre capacité de calcul pour répondre à la demande en quelques minutes seulement. C’est ce qui nous permet de faire évoluer notre plateforme à grande échelle, avec un niveau de réactivité et de robustesse que peu d’acteurs peuvent aujourd’hui atteindre.
Sur des sujets comme le design, l’expérience utilisateur ou la personnalisation, comment l’équipe machine learning collabore-t-elle avec les designers et responsables de marque, chez Adobe comme chez vos clients ?
Nous avons au sein d’Adobe plusieurs équipes très spécialisées qui travaillent main dans la main avec les utilisateurs et les clients. Une équipe de recherche dédiée étudie leurs usages et fait remonter chaque semaine des enseignements précis pour orienter nos produits et nos feuilles de route.
Nos équipes design observent les interactions, identifient les points d’amélioration et font évoluer les workflows en continu. Nous avons aussi un Customer Advisory Board qui échange régulièrement avec les entreprises pour identifier les cas d’usage qui fonctionnent et les nouveaux besoins qui émergent avec l’évolution des technologies.
Nous ne réagissons pas à chaud. Nous testons, nous analysons, nous validons avec les utilisateurs.
Toutes ces informations nourrissent notre stratégie produit et notre planification. Il nous arrive d’ajuster rapidement nos priorités, ce qui est positif : cela signifie que nous apprenons vite. Firefly, et plus largement le groupe Creative Product Group dirigé par Ely Greenfield, font preuve d’une grande agilité, tout en restant responsables. Nous ne réagissons pas à chaud. Nous testons, nous analysons, nous validons avec les utilisateurs.
De l’extérieur, on a parfois l’impression que nous avançons très vite, mais en réalité, il y a énormément de travail en coulisses pour proposer des solutions solides, testées et adaptées aux besoins réels des clients.
Quels indicateurs utilisez-vous pour mesurer la réussite de l’adoption de l’IA générative dans une entreprise ? Productivité, cohérence de marque, time-to-market ?
Le time-to-market est aujourd’hui l’un des indicateurs les plus parlants. De nombreuses entreprises nous disent qu’elles n’avaient jamais pu produire aussi vite, ce qui est une évolution majeure.
Mais nous mesurons aussi la qualité du produit et l’efficacité de nos boucles de retour utilisateur. Par exemple, chacun peut aujourd’hui tester les workflows sur firefly.adobe.com et envoyer un feedback directement depuis l’interface. Ces retours sont analysés et réinjectés dans nos modèles pour les améliorer en continu.
Cela demande quelques clics supplémentaires, mais nous les prenons très au sérieux. Plusieurs utilisateurs nous ont d’ailleurs confié avoir vu leurs remarques prises en compte rapidement. Ces échanges directs sont extrêmement précieux, car ils renforcent notre façon de travailler et améliorent la qualité du produit.
Enfin, la rapidité avec laquelle nous intégrons les retours et corrigeons les problèmes est un autre indicateur clé. Et jusqu’ici, nos grands clients se montrent très satisfaits. C’est un signe que nos processus tiennent bien la route.
Quel a été le principal défi pour vous et votre équipe ces derniers mois ?
Je ne parlerais pas vraiment de défi. Nous travaillons beaucoup, certes, mais sans pression excessive, car toute l’entreprise partage une même motivation : comprendre la créativité plus en profondeur et repousser ses limites grâce aux nouvelles technologies.
Ce qui compte pour nous, c’est de rester proches de nos utilisateurs et de nos clients.
Nous vivons une période passionnante. Ce qui compte pour nous, c’est de rester proches de nos utilisateurs et de nos clients, d’apprendre à travers leurs retours et d’éviter de construire des solutions qui ne répondraient pas à leurs besoins réels.
Notre objectif est d’éduquer et d’accompagner les créateurs, pour leur montrer que ces outils sont conçus pour amplifier leur créativité, pas pour la remplacer. C’est cette conviction qui nous guide chaque jour, et c’est ce qui rend cette aventure aussi stimulante.
 
									Rajan Vashisht, Senior Director of Machine Learning and Firefly Product
Rajan Vashisht dirige les équipes en charge du machine learning et du développement produit de Firefly, l’IA générative d’Adobe. Il pilote l’intégration des modèles dans les outils créatifs du groupe et accompagne les entreprises dans la mise en œuvre de solutions d’IA sûres, personnalisables et adaptées à leurs besoins.
 
						 
						 
						 
						 
			 
									 
									 
									 
				 
			 
				