Profils en T : l’importance de la transversalité dans les métiers du web

Travailler dans le web nécessite, en plus d’être bon à son poste, de savoir collaborer avec les autres disciplines du numérique. Comment les écoles s’y prennent-elles pour former les futurs manager de projet Web et mobile ? Nous vous proposons un éclairage sur le sujet avec SUP’Internet.

équipe Kali
L'équipe du projet Kali

Travailler de manière transversale est devenu une obligation

Formalisé par David Guest en 1991 avant d’être popularisé par le CEO de IDEO Tim Brown, le concept de compétences en T est plus que jamais d’actualité dans les métiers du web. La barre verticale du T représente les compétences propres au métier de la personne (par exemple, son expertise en SEO), la barre horizontale symbolisant sa capacité à comprendre les sujets transversaux et à collaborer avec des personnes de ces spécialités (par exemple en développement, design, marketing…).

Camille Boëtsch Dehee, consultante digital & learning à Reshape Learning, est membre du jury de fin d’année des projets entrepreneuriaux des Bachelor de SUP’Internet. Selon elle, ce nouveau profil en T n’est pas une option. « Il devient difficile d’avoir une vision de structure projet type MOE/MOA dans une entreprise, où on sépare la stratégie de l’opérationnel et de la techno. Il y a un vrai besoin d’avoir des savoirs fondamentaux, d’avoir un langage commun, pour que les gens soient capables de réfléchir ensemble. C’est une façon de penser les choses, de les aborder quand on travaille, qui a fortement évolué ces dernières années. »

Plus question de penser une structure de manière compartimentée si on veut qu’elle avance de manière optimale. Tout le monde doit travailler ensemble et comprendre comment les autres services fonctionnent. « Il y a quelques années, c’était assez clivé, explique Camille Boëtsch Dehee. Le service marketing pensait à quelque chose, rédigeait un cahier des charges et l’envoyait au service technique. Les méthodes de travail ont considérablement évolué aujourd’hui : on est en agilité. Les usages se pensent dans la technologie, et vice et versa car la technologie a permis de repousser les attentes, les envies et les expériences humaines. En agilité, on s’appuie sur l’expérience utilisateur pour améliorer le produit de façon continue. Toutes les compétences pour comprendre, developper les produits et penser aux usages possibles de ces produits sont donc indissociables. »

Il y a un vrai changement de paradigme dans les organisations, aussi bien dans la manière d’aborder le travail que d’envisager la production de valeur. En conséquence, les compétences demandées évoluent. Pour accompagner ce changement profond et répondre aux nouvelles normes d’employabilité, SUP’Internet a mis en place un projet sur deux ans pour ses élèves.

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Un projet sur deux ans pour travailler ses compétences en T

Pour plonger ses étudiant(e)s en situation professionnelle, SUP’Internet les fait travailler pendant deux ans (en 2ème et 3ème année) par groupes de 6 minimum sur un projet commun. Les équipes sont obligatoirement composées d’étudiant(e)s issu(e)s de chacune des spécialités des Bachelor de l’école : Web design, Web Marketing et Web Development. Selon Nicolas Reggiani, Consultant Marketing Digital à Soviet Suprem et membre de l’équipe pédagogique, ils doivent « trouver une idée entrepreneuriale, s’assurer de sa viabilité et la développer pour proposer un projet abouti en fin de cursus. » Et ils se plongent donc directement dans la réalité de la vie en entreprise, à ses difficultés, et notamment à leur capacité à travailler de manière transversale avec d’autres corps de métiers. Les étudiant(e)s sont suivis tout au long du projet, comme l’explique Nicolas Reggiani : « Nous sommes 4 à les suivre : un référent dans chacune des disciplines (marketing, développement, design) et un membre de l’équipe pédagogique. Nous sommes à leur disposition, à la manière de consultants, et nous effectuons un suivi collectif et individuel. » Les projets proposés sont très variés, à l’image du marché actuel : site de rencontres de niche, trottinettes en libre-service (avant la vague de start-ups lancées sur le sujet), gestion de vêtements d’hôtes et d’hôtesses ou encore service BtoB qui s’adresse aux développeurs. Certains trouvent même des financements pour continuer à se développer une fois le diplôme validé.

Pour Nicolas Reggiani, le plus important n’est pas nécessairement l’idée, mais plutôt l’équipe qui va être en charge de la développer. Est-ce que ses membres sont complémentaires ? Est-ce qu’ils arrivent à trouver le projet idéal par rapport à leurs compétences ? « En théorie, tout est facile, argumente-t-il. Ici, tout se déroule au contraire comme dans une vraie boite. Il faut faire avec les problèmes humains, avec les qualités de chacun, avec les apports différents et avec la faisabilité de chaque proposition. Parfois, certains projets sont vraiment intéressants, mais les étudiants n’ont pas les connaissances, le temps ou les moyens de le réaliser. Il faut alors changer de fusil d’épaule, s’adapter à la réalité du terrain et échanger avec les professeurs et l’équipe pédagogique, bien sûr. »  Un apprentissage à vitesse grand V et en conditions réelles, donc.

Et cette capacité à travailler ensemble se remarque, selon Camille Boëtsch Dehee. « Il est important de travailler sur la cohésion du groupe, sur la cohérence de ce qu’il propose. Une équipe qui a une vraie intelligence collective, où chacun a su apporter sur sa sphère de compétences, cela se voit tout de suite. Quand le projet est porté par une des trois disciplines, le déséquilibre se remarque vite. » Et pas question de conflits si on veut que cela fonctionne ! « S’il peut parfois y avoir des rivalités entre les équipes design, développement et marketing, ce n’est pas le cas ici. Les étudiant(e)s ont une véritable appétence pour le travail en mode projet qui leur permet de développer une vision globale de toute la chaine de production de valeurs, et ainsi de construire du sens.  Il y a un vrai respect, une conscience que le projet est un tout qui ne fonctionnera que si chacun apporte son savoir-faire. C’est plus simple de travailler sur des petites missions ou des tâches très opérationnelles, si on arrive à s’inscrire dans une démarche plus globale, plus large, et qui est porteuse de sens. »

Les Bachelors Web Design, Web Marketing, Web Development de SUP’Internet

Exemple d’un projet réussi : comment Kali a fédéré une équipe d’étudiant(e)s

Clémence Dewet, Carla Ponzio et Sodara Nhek font partie de l’équipe de 9 étudiant(e)s qui a développé le projet Kali ces deux dernières années. Cette application mobile permet à ses utilisateurs(trices) de scanner un produit cosmétique pour avoir accès à des informations concernant ses composants, mais aussi de personnaliser leur expérience en leur permettant de rentrer leurs caractéristiques personnelles (nature des cheveux, de la peau…) pour afficher un degré de compatibilité avec les produits scannés.

Le fait de pouvoir travailler pendant deux ans en conditions réelles a été très important pour faire arriver l’idée à maturité, selon Carla, spécialisée en webmarketing : « si on prend notre projet il y a deux ans et notre projet maintenant, l’évolution est forte, on a fait un bond en avant en termes de services proposés, de business, de maquette, ou d’algorithme. Les intervenants nous aidaient énormément, venaient nous voir régulièrement pour débloquer certaines situations ou répondre à nos questions. Nous avons également été amenés à pitcher notre concept pendant 4 minutes, de façon claire et professionnelle, devant les étudiant(e)s, les professeurs et l’équipe pédagogique. Tout cela nous a aidé à nous mettre en situation. » Si l’aide reçue dans le cadre de la formation a été importante pour réussir à faire avancer Kali, l’effort collectif et la transversalité des compétences a été au cœur de la réussite du groupe, comme l’explique Clémence, qui travaille sur le webdesign du produit. « Le travail fourni doit répondre à certaines contraintes techniques, nous avons donc adapté notre côté créatif pour pouvoir élaborer un produit stable et fonctionnel. Il faut un peu du métier de chacun pour pouvoir arriver à ce résultat. Nous avons appris à permettre aux développeurs(euses) de travailler dans des conditions optimales, à l’aide d’environnements collaboratifs notamment. »

Les enseignements tirés de cette expérience ont été nombreux. Pour Carla, l’idée d’être prête à entrer dans le monde professionnel est un atout majeur. « Nous avons appris à être autonomes et force de proposition. Nous avons également appris à respecter des deadlines et à prendre conscience des impératifs d’un projet : par quelle discipline commencer, le temps nécessaire pour réaliser une maquette, pour l’intégrer, pour développer une fonctionnalité… Je pense que c’est une plus-value sur le marché, cela m’a beaucoup apporté quand je suis arrivée en stage. » Pour Sodara, développeur, l’apport se fait également sur les soft skills. « Quand je développe seul, j’ai tendance à réfléchir sur mon périmètre. Collaborer apporte plusieurs points de vue, cela m’a permis de connaître mes points forts et mes propres limites, mais aussi de remettre mon travail dans un contexte plus général. Cela m’a également permis d’être plus à l’aise socialement en équipe, de communiquer avec des personnes ayant des compétences différentes et complémentaires. »

La soutenance s’est déroulée avec succès en juillet, ce qui n’empêche pas l’équipe de se projeter sur le développement de Kali, puisque leur projet est viable et fonctionne. Préparez-vous donc à en entendre parler dans les mois à venir !

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