Threads : opportunité ou fausse bonne idée pour les marques ?
Nous avons interrogé Nicolas Guillemot, fondateur de l’agence de social intelligence Dynvibe, sur les perspectives offertes par Threads, réseau social lancé en décembre dans l’Hexagone.
Nicolas Guillemot, fondateur et PDG de Dynvibe
Issu d’une formation en ingénierie informatique, Nicolas Guillemot travaille depuis plus de 20 ans dans le secteur des MarTech. Il a d’abord fait ses armes en tant que chef de projet au sein de LGS Group avant de rejoindre Digitas France (ex-Business Interactif) en 2001. Il a rapidement évolué au sein du groupe et a notamment participé au déploiement de Digitas en Australie. En 2009, face à l’essor des médias sociaux, il cofonde Dynvibe avec Anne-Cécile Guillemot, agence de social intelligence.
Tout d’abord, quel est le principal atout de Threads ?
Le principal atout de Threads réside dans son intégration à l’écosystème de Meta, ce qui lui permet de bénéficier de la force de frappe d’un groupe qui possède trois des cinq plateformes sociales les plus utilisées à l’échelle mondiale (Facebook, WhatsApp et Instagram). On le constate en termes d’acquisition d’utilisateurs grâce à la connexion avec Instagram, mais aussi sur la modération, bien que tout ne soit pas parfait, bien entendu. Meta renvoie une image nettement plus positive que X (Twitter), surtout depuis qu’Elon Musk applique sa nouvelle politique. Cela crée un sentiment de sécurité chez les utilisateurs, et surtout les utilisatrices, qui sont régulièrement confrontées au harcèlement quand elles publient du contenu sur X (Twitter). Cela rassure également les marques, qui vont avoir tendance à s’investir sur un réseau sans toxicité ni nuisances.
Ainsi, Threads peut être davantage envisagé comme une safe place où il est plus facile de communiquer, d’exprimer des idées ou d’échanger. Un lieu de partage où les discussions ne sont pas systématiquement polluées. C’est un avantage considérable pour une plateforme axée sur l’écrit. Presque un « game changer », par rapport à X (Twitter).
Au-delà de l’acquisition d’utilisateurs, quels autres bénéfices Threads peut-il tirer de sa connexion à Instagram ?
Il peut sembler pertinent d’établir des liens entre Instagram et Threads. Pour la plupart des marques, Instagram est considéré comme une vitrine, un catalogue d’annonces, où il est possible de diffuser des informations sur l’entreprise et de valoriser ses points forts. Mais la relation de proximité avec la communauté et peut et doit se construire sur Threads.
Est-ce risqué pour les marques de se lancer rapidement sur Threads ?
Lors du lancement de Threads aux États-Unis, en juillet, de nombreuses marques telles que Nike ou McDonald’s ont créé leur espace, et parfois accumulé plusieurs millions d’abonnés en ayant pas ou peu publié sur la plateforme. Le lancement de Threads représente une opportunité considérable pour les marques, mais également un risque, car les utilisateurs ayant rapidement adopté la plateforme s’attendent à davantage d’interactions et à une relation plus profonde avec la marque. Ils ne souhaitent pas simplement revoir des contenus déjà publiés sur Instagram ou X (Twitter).
L’exemple d’Oreo illustre la complexité à laquelle se confrontent les marques lorsqu’elles se lancent sur Threads. La marque a rapidement créé son compte, mais n’a rien publié pendant un moment tout en accumulant des abonnés. Et le premier message était un détournement du mème This is fine, avec un cookie au centre et l’accroche : « Destiné à manger des cookies Oreo, contraint de rejoindre un nouveau réseau social ». Cela montre qu’actuellement, les community managers se torturent l’esprit pour développer une stratégie pertinente sur ce nouveau canal.
Pour afficher ce contenu issu des réseaux sociaux, vous devez accepter les cookies et traceurs publicitaires.
Ces cookies et traceurs permettent à nos partenaires de vous proposer des publicités et des contenus personnalisés en fonction de votre navigation, de votre profil et de vos centres d’intérêt.Plus d’infos.
Threads crée-t-il de nouvelles possibilités pour les marques en matière de création de contenus ?
Oui, on le constate, certaines marques envisagent Threads comme un nouveau vecteur d’expression. On peut citer l’exemple de Marvel, qui utilise Instagram et X pour diffuser des annonces relatives à ses franchises et films, tandis qu’elle opte, sur Threads, pour la publication de GIF, de contenus vidéo ou textuels apportant des éléments de contexte sur les personnages ou les franchises. Ces formats permettent d’engager la conversation avec la communauté. Ils invitent à l’échange. Comme dit précédemment, Instagram se transforme en vitrine, tandis que Threads devient un vecteur de proximité.
Si une marque diffuse exactement le même contenu sur Threads que sur d’autres plateformes, elle aura manqué l’opportunité d’exploiter pleinement ce réseau.
En outre, Threads offre la possibilité d’encourager les utilisateurs à créer du contenu qui se rapporte à la marque, en s’appuyant, par exemple, sur des IA génératives telles que Midjourney ou ChatGPT. Une marque pourrait notamment demander à ses abonnés de générer le prochain communiqué de presse pour un produit ou un visuel qui illustre la voiture de demain pour une cible Gen Z. Évidemment, il faut le faire avec sincérité, et avec de l’authenticité. Il ne suffit pas de balancer un sondage ou un concept si on ne réagit pas aux contenus qui sont réalisés par les communautés.
Pour afficher ce contenu issu des réseaux sociaux, vous devez accepter les cookies et traceurs publicitaires.
Ces cookies et traceurs permettent à nos partenaires de vous proposer des publicités et des contenus personnalisés en fonction de votre navigation, de votre profil et de vos centres d’intérêt.Plus d’infos.
Threads ne semble-t-il pas être en train de prendre la même trajectoire que celle empruntée par Twitter à ses débuts ?
À la fin des années 2000, Twitter était envisagé comme un réseau « fun » et se distinguait de Facebook, davantage axé sur les interactions avec la sphère familiale ou le cercle privé. Sur Twitter, on pouvait échanger, discuter, trouver de l’information, et tout cela avant même que les médias et la presse ne l’utilisent en tant que canal de diffusion. Threads est dans cette mouvance-là, c’est perceptible. Sur X (Twitter), à l’heure actuelle, les marques continuent d’utiliser des fonctionnalités interactives, comme les sondages ou les questionnaires, mais n’invitent plus nécessairement à la conversation. Même les marques qui sont très axées sur le conversationnel, comme Burger King.
Lors de son lancement en juillet, Threads avait connu une croissance rapide, puis perdu progressivement des utilisateurs. En Europe, le démarrage fut également plutôt modeste. Comment l’expliquer ?
Le succès d’un réseau social ne se mesure pas en six mois. Même en bénéficiant de la force frappe de Meta, on peut difficilement préjuger d’un succès. Google a ramé pendant des années avant d’abandonner Google +, par exemple. On peut être un mastodonte, disposer de moyens financiers conséquents, rien ne garantit l’adhésion des utilisateurs. Sur le plan du marketing et de la communication, compte tenu de la situation chez X (Twitter), le lancement était opportun, même si l’application n’était pas totalement opérationnelle. Mais je suis assez optimiste pour la suite. C’est l’arrivée des marques, des influenceurs, et la publication de contenus originaux qui conditionnera l’adhésion à Threads. Twitter n’était peuplé que d’early adopters, au départ.
Community managers : découvrez les résultats de notre enquête 2025
Réseaux, missions, salaire... Un webinar pour tout savoir sur les CM, lundi 29 septembre à 11h !
Je m'inscris