Taïg Khris raconte l’histoire hors du commun de sa startup onoff
Nous avons échangé avec Taïg Khris sur le chemin parcouru avec onoff, sa startup spécialisée dans les télécoms.
Vous connaissez probablement la précédente carrière de Taïg Khris : celle d’un sportif extrême triple champion du monde de roller et vainqueur des X-games. Ou celle qu’il a connue après : animateur et consultant pour la télévision, et participant à diverses émissions comme Danse avec les stars. Une facette de Taïg Khris est moins connue : son penchant entrepreneurial. Après la création de plusieurs sociétés, il a fondé en 2014 onoff, avec comme objectif assumé de vouloir révolutionner le monde des télécoms. 5 ans plus tard, il a levé en tout 20 millions d’euros, a dépassé les 50 collaborateurs et a atteint la rentabilité. Un titre de plus pour ce personnage hors-norme. Il nous a raconté comment se sont déroulées ces 5 années, et la manière dont il voit le futur.
onoff existe depuis 5 ans, et a levé 10 millions d’euros l’an passé. Où en est actuellement la société ?
Nous avons dépassé les 50 collaborateurs, dont beaucoup d’ingénieurs. Nous recrutons actuellement des commerciaux pour vendre notre produit, qui a nécessité plusieurs années de travail avant d’être pleinement opérationnel. Nous avons levé en tout 20 millions d’euros. 10 millions avec des actionnaires privés qui m’ont fait confiance depuis le début : en tout, 130 personnes issues de mon entourage qui m’ont permis de démarrer. Des fonds d’investissement sont entrés plus tardivement en ajoutant 10 millions d’euros. Nous atteignons actuellement la rentabilité, avec plusieurs millions d’euros de chiffre d’affaires par an et 100% de croissance lors des six derniers mois.
Nous diversifions actuellement nos produits. Le principal est une application qui s’appelle onoff et qui permet d’obtenir un second numéro de téléphone en un clic. Elle est disponible sur l’App Store et sur Google Play. Elle peut vous permettre de différencier numéro pro et numéro perso, ou d’avoir un numéro d’un pays différent sur le même téléphone que votre numéro principal. Nous venons de lancer une deuxième offre pour les entreprises. Elle permet aux managers de gérer ses flottes de numéros et de les attribuer à leurs salariés. Ces derniers reçoivent un lien de téléchargement vers l’application onoff business, où tout sera géré pour eux. Enfin, différentes offres télécom vont être lancées avant la fin de l’année : appels moins chers à l’international, standards téléphoniques… Cela nous permettra de diversifier nos offres. Nous avons des licences dans le monde entier et des brevets innovants de déposés, nous sommes donc très confiants dans l’avenir.
Pourquoi avoir choisi de vous investir dans les télécoms, de monter une start-up alors que votre parcours ne vous amenait pas naturellement vers ce projet ? Qu’est-ce qui vous a donné l’idée ?
J’étais passionné de technologie, évidemment. Mes activités audiovisuelles me plaisaient, mais je ne me voyais pas les exercer toute ma vie. Je suis quelqu’un qui a besoin de créer. J’avais déjà passé 20 ans dans le monde des sports extrêmes, à devoir être ingénieux pour sortir mon épingle du jeu, à devoir être multifonction pour gagner ma vie. Je voulais de la nouveauté. Donc je me suis dit : quitte à choisir une industrie, autant voir les choses en grand et choisir la plus grande industrie au monde. Je ne serais peut-être pas le numéro 1 mondial dans cette industrie, mais même si je suis centième mondial dans le monde des télécoms, j’aurais une boîte gigantesque. Je savais qu’il y avait du chemin à parcourir, que je devrais travailler et apprendre avant de maitriser mon sujet, mais je voulais sortir de ma zone de confort et me donner des chances pour l’avenir.
J’ai voulu inventer quelque chose qui n’existait pas, que je pouvais vendre dans tous les pays à travers le monde, qui ne soit pas limité dans sa distribution et qui concerne une industrie d’envergure. L’idée d’onoff répondait à tous ces critères. Nous sommes dans un monde où tout est dans le cloud : nos mails, nos photos, notre musique, nos films… Nous pouvons changer d’ordinateur ou de téléphone et récupérer un accès à tout cela. Mais ce n’était pas possible pour notre numéro de téléphone. Quand on perdait le nôtre, on devait récupérer une carte SIM, se rendre dans un magasin pour en acheter un nouveau… Il y avait des délais avant de pouvoir le réutiliser. C’était un non-sens. J’ai donc souhaité pouvoir mettre nos numéros dans le cloud, en pensant que cela pouvait être une révolution, que la dématérialisation de ces numéros pourrait ouvrir la porte à de nombreuses fonctionnalités et faciliterait la vie des gens.
Par quelles étapes êtes-vous passés avant de réussir à atteindre la rentabilité ?
Quand on est rider, coincé dans un lit d’hôpital avec une jambe cassée, que l’on n’a pas d’argent et que l’on se dit « l’avenir des télécoms, c’est de mettre les numéros de téléphone dans le cloud », on n’a pas toutes les cartes en main pour bien démarrer. Il l’a donc fallu commencer par trouver des professionnels qui puissent me confirmer que l’idée était réalisable, techniquement et légalement. Et je ne connaissais même pas leur nom de poste ! J’ai réussi à trouver l’ancien chef architecte télécom d’Orange, qui m’a confirmé la faisabilité du projet, en m’ajoutant une contrainte de taille : un numéro de téléphone ne peut être détenu que par un opérateur télécom. Pour obtenir des numéros dans tous les pays, il me fallait donc créer un opérateur mobile mondial ou demander à un existant de me donner des numéros, avec le risque de me faire voler l’idée.
A chaque fois que j’avançais, j’apprenais quelque chose de nouveau, mais je faisais face à de nouvelles barrières. Le fait de ne rien connaître et de commencer de zéro m’a permis de foncer, et de passer ces barrières une à une. J’ai appris que je pouvais monter un opérateur en sous-louant les antennes des autres, sans avoir besoin d’investir des milliards d’euros dans le réseau. J’ai fait le choix de devenir un MVNO, mais cela ne réglait pas tout, il me fallait tout de même plusieurs millions d’euros, du développement, une équipe et plusieurs années devant moi. J’ai donc démarré plus vite en sous-louant l’accès d’un opérateur technique français, qui m’a permis de gagner du temps et de me lancer plus vite. Mais cela me coûtait 150 000 euros, plus 10 à 20 000 euros par mois, et je devais continuer de développer mon produit de mon côté. J’avais évalué mon besoin à un million d’euros pour arriver à avoir mon prototype en comptant cette charge, mais aussi les salaires des ingénieurs qu’il faudrait que j’embauche. Je suis allé voir les fonds d’investissement sur cette base. Ils m’ont tous claqué la porte, pensant que j’allais leur proposer quelque chose en rapport avec les sports extrêmes. Mais j’ai réussi à lever la somme nécessaire auprès de 30 proches qui ont investi dans la société.
Mais j’avais grandement sous-estimé la somme nécessaire à la mise en place du projet, qui s’est révélée plutôt comprise entre 10 et 15 millions d’euros. Pendant 4 ans, nous étions donc tous les mois au bord de la faillite. Je démarrais avec zéro en banque le premier du mois, et je devais trouver 250 000 euros avant le 23 du mois pour payer les salaires. C’était psychologiquement difficile, car je devais en parallèle développer le produit, manager l’équipe, inventer les brevets, gérer la régulation… Au final, les fonds d’investissement ont accepté d’investir 10 millions d’euros, sur la base d’une valeur bien plus élevée que celle que j’avais présentée quelques années auparavant. Une vraie victoire, même si elle s’est faite dans la douleur.
Est-ce que l’expérience du sport de haut-niveau aide dans ce genre d’aventure ?
Tout à fait. La combativité, la résilience, la force de caractère aident dans ces moments difficiles. Faire des sports extrêmes, c’est jouer avec son intégrité physique, mais aussi gérer la pression, les peurs, l’adrénaline, à un niveau incommensurable. Quand on fait du sport de haut-niveau, on travaille tout une vie et, le jour de la compétition, tout se joue en une seconde. Heureusement que j’avais fait ces 15-20 ans de compétition, cela m’a aidé à gérer les situations difficiles sans paniquer.
Quels sont les objectifs à court et moyen terme pour onoff ?
L’objectif, c’est d’essayer de réinventer le monde des télécoms, qui est un univers vieillissant. Je veux amener l’expérience utilisateur du monde applicatif au monde télécom, et la technologie du monde télécom au monde applicatif. Tirer le meilleur parti des deux, les mélanger alors qu’ils étaient auparavant totalement séparés. Maintenant que l’on a une technologie et un produit, nous passons à une phase à la fois de vulgarisation, mais aussi de diversification. Il faut faire comprendre aux gens que s’ils veulent avoir un numéro pro, ils n’ont plus besoin d’avoir deux cartes SIM, de payer deux abonnements, d’avoir deux téléphones dans la poche. Cela peut se faire en un clic via une application. C’est la même chose pour les entreprises, qui peuvent gérer les numéros de multiples salariés à distance plus simplement. Et en parallèle, pour arriver à cet objectif, il y a mon évolution personnelle : apprendre à manager, à construire des équipes qui grandissent tout en gardant les ingrédients qui ont fait que onoff a réussi à voir le jour. On n’agit pas de la même manière à 2 qu’à 10, 20 ou 50 !
Crédit images : onoff.
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