Slack, Zoom et emails sont-ils vraiment bons pour notre productivité ?

L’émergence du télétravail et du travail à distance a donné encore plus de poids aux outils de communication tels que Zoom, Slack, Teams, ou au traditionnel email. Mais sont-ils vraiment utiles pour travailler mieux ?

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Trouver l'équilibre entre messageries instantanées, mails et visioconférences.

Souvent présenté comme une distraction permanente qui nous empêche de nous concentrer sur les tâches de fond, l’email a largement été remplacé par les messageries instantanées (Slack ou Teams notamment). Mais ces dernières qui devaient nous libérer de l’email sont à leur tour devenues un levier de distraction : sollicitations permanentes, notifications à toute heure, channels pas toujours très professionnels… Aux messageries et aux emails se sont maintenant ajoutées les « visios ». Encore anecdotiques avant le confinement, elles sont devenues le principal canal de réunion et ont rapidement détrôné le classique appel téléphonique. Mais cette multiplicité d’outils est-elle vraiment bénéfique pour notre productivité ?

Avantages et inconvénients des messageries instantanées

Plus de collaboration et de fluidité des échanges

Les avantages des messageries instantanées sont assez évidents : une communication en temps réel, et des réponses immédiates aux questions posées. Les messages sont reçus et vus immédiatement, il n’y a plus de délai de latence dans les échanges.

Ces outils rendent aussi les conversations plus réactives : un collègue est plus à même de répondre rapidement à un message Slack qu’à un email. Autre avantage de la messagerie : on évite de perdre du temps à faire des phrases longues, ou à inclure des formules de politesse. Le format est plus direct : « tu peux m’envoyer la version à jour du logo ? », pas de bonjour, cordialement, etc. Les échanges sont plus concis, et moins formels. Cette concision est évidemment un gain de temps important, on ne perd plus de temps à introduire son propos.

Les notifications sont aussi un avantage de poids des outils de messageries. Ces pop-up parfois insupportables sont néanmoins la garantie d’un message vu, et vu tout de suite, que ce soit sur desktop ou sur mobile. Et contrairement aux emails, les notifications n’intègrent que des sujets qui vous concernent, et ne sont pas noyés dans des spams, des demandes externes, ou des emails inutiles et promotionnels.

Les messageries ont aussi l’avantage de s’adapter aux besoins de leurs utilisateurs. Vous pouvez aussi facilement lancer un échange one-to-one qu’une conversation avec toute une équipe, ou les membres d’un projet. Dernier point fort et non des moindres, la possibilité de switcher de l’écrit à la visio quand une discussion devient trop complexe, et qu’on a besoin de l’expliquer plus clairement.

Difficile aussi de ne pas apprécier le côté « ludique » des messageries : emojis, gifs, blagues… Cette dimension « sociale » a aussi un intérêt pour garder un lien avec les collaborateurs en télétravail, ou avec des équipes distendues par des périodes prolongées sans pouvoir se voir au bureau. Mais elle est aussi source de distraction.

… Et moins de travail profond.

Les messageries représenteraient environ 10 heures de temps par semaine et par salarié. Ce temps passé sur les plateformes n’est pas toujours vraiment utile pour mener à bien ses tâches et ses projets, au contraire.

L’hyper connectivité et le temps réel tuent le travail profond. Pour mener à bien certaines tâches, il est indispensable de se concentrer et de rester focus sur un temps long. Les notifications permanentes, les nouveaux messages dans le channel « Apéro » ou « Restau du midi » empêchent de se concentrer sur la durée.

Les messageries encouragent le multitasking, qui est le principal frein à notre productivité. L’hyperdisponibilité et le temps réel sont incompatibles avec les tâches de fond qui demandent une concentration durable.

Il en est de même pour le partage d’écran perpétuel qu’exigent les messageries et notamment Slack. Garder un onglet dédié à sa messagerie est un excellent moyen d’y jeter un oeil en permanence et de perdre toute capacité à se concentrer. A chaque fois qu’on change de tâche, il y aurait une « pénalité cognitive » de 23 minutes. Ce qui explique qu’on peut passer sa journée à être « sous l’eau », mais en ayant finalement très peu travaillé. La majeure partie de la journée sera en fait passée à essayer de se mettre réellement au travail entre quelques conversations Slack, 50 checks de ses emails, et quelques visios.

On peut enfin remettre en doute le mantra de la productivité distillé par Slack : mettre fin aux emails. Certes, l’outil réduit le nombre de mails (de 48,6% selon leurs chiffres), mais trop souvent un mail inutile est remplacé par… un message Slack inutile.

Comme pour l’email, il faut s’astreindre à une certaine discipline pour utiliser les messageries efficacement et ne pas sacrifier sa productivité :

  • Prioriser le travail asynchrone et le travail profond aux réponses immédiates ;
  • Gérer ses notifications ;
  • Ne pas hésiter à se déconnecter de Slack, et concentrer ses moments de connexion sur certaines périodes ;
  •  Ré-utiliser le téléphone ;
  • Ne pas sursolliciter les autres :  plus vous enverrez de messages, et plus en vous recevrez ;
  • Bien gérer les channels : évitez les chans géants qui se transforment en discussions ingérables et sans ligne directrice.

 Le mail : mille fois enterré, mais toujours indispensable

Le vétéran de la communication en entreprise a encore de beaux jours devant lui. Il reste indispensable et le canal le plus adapté dans de nombreuses situations. Les messages longs notamment, avec une vraie réflexion, ou des orientations importantes sont incompatibles avec les messageries. Idem pour les messages avec des destinataires multiples, qui deviennent très vite chaotiques sur Slack ou Teams.

Mais là encore, le mail n’est pas un outil miracle qui nous permet par nature d’être plus efficace. Les emails sont asynchrones, et boucler une conversation par email peut vite prendre une journée. Surtout si l’interlocuteur décide de ne prendre que quelques créneaux par jour pour traiter ses mails (ou s’il met plusieurs jours à y répondre).

Autre problème du mail : son volume toujours plus important. Une personne reçoit plus de 120 mails par jour mais seulement 38 % sont vraiment importants. Selon McKinsey, un employé passerait en moyenne 13 heures par semaine sur ses mails, soit 28 % de son temps de travail. Selon Adobe, ce chiffre serait en fait de 209 minutes par jour, soit quasiment 18 heures par semaine. À chaque fois que l’on « checke » ses mails, il faudrait d’ailleurs 64 secondes pour se reconcentrer sur ses tâches.

Selon certains chiffres, en moyenne on regarderait sa boîte mail environ 15 fois par jour. Le plus souvent pour des emails sans intérêt. Finalement, mails et messageries ont les mêmes limites, et nécessitent la même discipline pour ne pas être happé par un flux d’informations entrantes empêchant de se concentrer sur ses tâches.

L’émergence des visios : un nouvel allié de la productivité ou une nouvelle perte de temps ?

« J’ai calé une visio » sera sûrement une des phrases marquantes de ces épisodes de confinement et de télétravail. En quelques mois, nous avons abandonné les classiques réunions téléphoniques au profit de visios Zoom, Teams, Google Meet, Whereby… Même les conversations Slack ont la fâcheuse tendance à se transformer en visio sans raison valable. Et la conséquence ne s’est pas fait attendre, on parle déjà de « Zoom fatigue », ou de « Zoom burnout ».

Les visios ont en effet un défaut de taille : elles nous obligent à visualiser un nombre important de visages, y compris le nôtre, tout au long de l’échange. Voir tous ces visages en permanence et pas uniquement notre interlocuteur nous empêche de nous concentrer, et d’être efficace pendant le call. Plus insidieux encore, la multiplication des visios crée une vraie fatigue, et un rejet de ce mode de communication qui oblige à faire bonne figure en permanence.

Pendant un appel téléphonique, ou un Zoom sans caméra, vous mettez fin à toutes les distractions parasites : décoration du salon, enfant qui débarque de façon impromptue, couleur des murs qui nous perturbe, chat devant la webcam… Et surtout, il n’y a plus à être concentré en permanence sur les expressions non-verbales, qui sont au cœur des visios. Le téléphone, ou le Zoom sans caméra permettent de se gratter le nez, se faire un café, ou même marcher, sans avoir à se concentrer pour faire bonne figure face à son interlocuteur.

L’autre problème majeur de ces réunions en visio : les écrans sont par nature fatigants. Nous avons donc tendance à moins bien mémoriser les informations, à être moins concentré, et à avoir plus de mal à nous remettre sur des tâches de fond après plusieurs réunions en visio.

Là encore, ce canal de communication devrait être utilisé quand il est vraiment nécessaire : présentation, annonce importante, création de liens ou de moments d’équipe…

Une question d’équilibre et d’organisation

Il y a en fait dans chaque technologie un « sweet spot » qui est un équilibre parfait entre productivité et technologie. Concrètement, n’importe quel canal de communication peut aider à la communication, et notamment à la communication interne. Un Slack ou une visio peuvent servir la recherche d’information pour avancer sur n’importe quel projet. Mais très vite, la technologie peut devenir un poids. Selon Slack, les « power users qui envoient plus de 1000 messages par jour ne sont pas une exception« . Idem pour les visios qui peuvent s’avérer très utiles pour créer de la proximité avec son interlocuteur, ou pour échanger clairement et franchement comme on le ferait de visu. Mais que ce soit en multipliant le temps passé sur Slack, sa boîte mail, ou sur Zoom, on n’augmente pas sa productivité, on finit nécessairement par l’impacter et subir des conséquences négatives : perte de concentration, fatigue, difficulté à rester focus sur une tâche, anxiété…

Ces outils de communication devraient être moins utilisés que les canaux qu’ils remplacent pour être efficaces. Or, ils ont tendance à se superposer aux autres outils, et à nous prendre toujours plus de temps. Comme souvent, la solution ne viendra donc pas d’un nouvel outil magique censé booster notre productivité, mais plutôt  de notre capacité d’organisation.

Et pour cela, il est important de se baser sur des méthodes (voir chapitre dédié) adaptées à notre façon de travailler et notre organisation. Il est aussi primordial de séquencer ses journées, et justement de se défaire de Slack, des réunions (a fortiori en visio) ou de sa boîte mail. Il faut se garder des créneaux de « travail profond » et s’y tenir,  et ne surtout pas devenir esclave des notifications permanentes.

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