Retour d’expérience : l’utilisation de la vidéo live au Figaro

Marie-Amélie Putallaz, chef de service social media et Sylvain Chatelain, rédacteur en chef adjoint du Figaro et responsable de Figaro Live, nous expliquent les usages du média en matière de vidéo live.

actu figaro live

Si on devait résumer les grandes tendances qui ont influencé le web ces dernières années, le temps réel et la vidéo sont en très bonne place. Il n’est donc pas étonnant de voir les médias s’intéresser à la diffusion en live de vidéos, qu’elles soient liés à l’actualité, à des évènements particuliers ou à des débats d’opinion. Une manière de lier plus étroitement les rédactions et les lecteurs, mais aussi de trouver de nouveaux axes de développement de l’audience. Marie-Amélie Putallaz, chef de service social media et Sylvain Chatelain, rédacteur en chef adjoint du Figaro et responsable de Figaro Live, nous livrent dans cette interview un retour d’expérience qui nous permet de mieux comprendre où nous en sommes actuellement, les objectifs recherchés et les voies qui restent à explorer.

Depuis quand faites-vous du live chez Figaro ? Qu’est-ce qui vous a poussé à vous y mettre ?

Sylvain Chatelain – Nos premières diffusions en direct depuis un plateau datent d’il y a plus de 10 ans, pour l’émission « Le Talk », tournée dans un studio du Figaro et diffusée en direct tous les jours, mais nous avons commencé à installer plusieurs heures de direct par jour avec le projet Figaro Live à partir de l’été 2016. Outre l’intérêt éditorial, il faut dire que le direct vidéo est tout simplement devenu plus abordable, financièrement et techniquement, avec le déploiement de la 4G et l’évolution rapide du matériel vidéo. A tel point qu’aujourd’hui, rares sont les événements d’actualité dont on n’imagine pas pouvoir suivre l’évolution en images et « en live », via des réseaux sociaux ou des médias.

Marie-Amelie Putallaz – Le Figaro a toujours eu un axe de développement très fort sur la vidéo, et publiait déjà des dizaines de VOD tous les jours avant le projet Figaro Live. Le direct était une très bonne manière d’intégrer la communauté dans un contenu éditorial. Le tchat de Figaro Live est un excellent outil pour l’interaction, et il permet d’interpeller les journalistes, ce qui est précieux. Un internaute peut poser une question, soumettre un avis et obtenir un retour immédiat sur ce qu’il vient d’écrire. Le rapport avec le spectateur est immédiat, et une forme de conversation s’installe durant les diffusions.

Quels types de formats diffusez-vous actuellement ? Sur quelles plateformes ? A quel rythme ?

MAP – Des reportages, des commentaires et analyses d’images en temps réel, des interviews, des débats, des éditions spéciales thématiques (élections, incendie de Notre Dame, défilé du 14 Juillet…) ou encore des jeux. Nous suivons l’actualité. Il y a des programmes quotidiens : le Buzz, qui est une interview avec des personnalités de la télévision à 10h30,  Décrypteurs, qui explique une actualité à 11h, le Talk, une interview politique à midi, Points de vue, notre plateau de débat à 17h… Et d’autres émissions hebdomadaires ou mensuelle, comme Une Série et au lit, qui traite des séries télévisées, ou Audition Publique, en partenariat avec Public Sénat et LCP.  Il y a à peu près six heures de direct par jour, tout ceci variant selon les informations du jour.

Nous avons un temps diffusé beaucoup sur Facebook Live – aujourd’hui, notre player principal est le player Brightcove, sur Figaro Live, que nous avons développé avec un tchat maison, et qui est disponible sur notre appli et sur notre site. Nous relayons quelques émissions sur Facebook chaque jour, mais nous en avons de moins en moins besoin. En revanche, nous faisons des essais sur Twitch.

Combien de personnes sont mobilisées sur ce thème, dans quel services ?

SC – Il y a environ 30 collaborateurs dans le service vidéo Figaro Live, dont 3/4 de journalistes et 1/4 de techniciens, mais jusqu’à présent tout le monde ne travaille pas en permanence sur du live vidéo. La VOD reste une part importante de notre audience et de notre volume de production (plusieurs dizaines de vidéos produites par jour) donc la plupart des membres de l’équipe sont amenés à travailler sur de la VOD et sur du direct. Les profils sont très divers, allant de journaliste vidéo à chargé-e de programmation, en passant par motion designer, réalisateur-trice ou encore journaliste présentateur-trice.

Une nouveauté pour 2019-2020 est la réorganisation de l’équipe pour créer une unité de production entièrement dédiée au live vidéo type « breaking news » : une petite équipe mixte de journalistes et techniciens qui aura la mission de faire vivre les événements en direct et de couvrir en direct vidéo l’actu très chaude.

MAP – Un community manager est à toute heure disponible pour la modération et l’animation du tchat.

Quels résultats observez-vous en termes d’audience ?

SC – Aujourd’hui sur Le Figaro, l’audience vidéo provient encore majoritairement de la VOD, plus installée dans les usages du grand public et plus mature côté produit, mais je suis convaincu que la part avec le plus fort potentiel de croissance est celle liée à la production de direct. D’autant plus que chaque live devient automatiquement une VOD une fois terminé, puis il est découpé pour être proposé sous forme d’extraits, de best-of et de morceaux choisis.

 

L’audience drainée par ce type de formats est-elle celle qui vient habituellement lire les articles ? Si non, en quoi change-t-elle ?

MAP – La communauté, surtout, est différente. Il y a de vraies communautés constituées autour de certains programmes. Nous savons très bien qu’une dizaine d’internautes attendent tous les soirs la diffusion de l’émission Points de vue pour échanger leurs opinions sur les controverses du jour. Et les commentateurs des streams sont différents de ceux qui commentent les articles.

Vous testez Twitch pour la diffusion de certains contenus. Que peuvent apporter les plateformes de ce genre aux médias traditionnels ?

MAP – Twitch permet de toucher une communauté qui a un intérêt pour l’actualité mais n’est pas forcément lectrice du Figaro. C’est une manière d’apporter de l’information à des internautes auxquels nous n’avions pas l’habitude de parler. De plus, Twitch s’ouvre à des contenus différents du jeu vidéo – la section « just chatting », par exemple, gagne en popularité. C’est une bonne opportunité de prise de parole pour un média.

SC – Les streamers de Twitch créent des codes qui appartiennent au monde de la vidéo en direct, mais pas à celui de la télévision qui en avait l’apanage jusque-là. Ils inventent les codes de la vidéo en direct sur le net. Pour les médias en ligne, c’est très intéressant.

Pensez-vous que le live soit devenu un passage obligé pour les médias en ligne ? Quel est son impact sur la manière d’aborder le journalisme

MAP – Non, il n’est pas un passage obligé pour les médias en ligne, mais il est un axe de développement stratégique. Côté éditorial, il permet un échange sans équivalent entre journalistes et spectateurs, presque sans filtre. Je dis presque parce que, bien sûr, il s’agit de respecter les règles de base de la politesse et de la loi dans les échanges et que la modération est la garantie pour nous d’un tchat intéressant et au sein duquel l’internaute peut se sentir libre de développer son point de vue dans de bonnes conditions. Bref, c’est une démarche horizontale et oui, quand notre reporter Thibault Izoret emmène les viewers au cœur d’une manif, en leur donnant ses impressions et en répondant à leurs interrogations en temps réel, c’est un format journalistiquement innovant.

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