Pour recruter de bons développeurs, les entreprises modernisent leurs approches

Le marché de l’emploi des développeurs est particulièrement tendu. Dans ce contexte, que peuvent mettre en place les entreprises pour convaincre les meilleurs profils ?

Large group of computer programmers working in the office.
Attirer les développeurs, un véritable défi pour les recruteurs. Crédits photo : iStock / skynesher.

Pour analyser le contexte actuel, décrypter les stratégies des recruteurs et comprendre l’évolution des attentes des développeurs, nous nous sommes entretenus avec Benjamin Mantal, qui travaille depuis près de 10 ans dans le recrutement IT. Il est head of France de HireFirst, une plateforme de recrutement dédiée aux professionnels de l’informatique.

La transformation digitale renforce la tension sur le marché du travail

L’informatique était autrefois considérée comme une fonction support. En quelques années, la transformation digitale a fait évoluer le rôle des “informaticiens” dans les entreprises, ils ont pris une place plus centrale. D’un côté, le numérique permet aux entreprises historiques de mieux répondre aux besoins des consommateurs. De l’autre, les possibilités offertes par les nouvelles technologies ont permis la création de startups dont le business model repose principalement sur des solutions numériques.

Pour concevoir ces services améliorés et ces nouveaux outils, basés sur la demande et les attentes des consommateurs, les entreprises recrutent de nombreux spécialistes techniques. On pense évidemment aux développeurs, mais également aux product owners, aux DevOps, aux spécialistes UX, ou autres data engineers… “Les besoins en main d’œuvre ont connu une forte croissance, observe Benjamin Mantal. Dans le même temps, le nombre d’écoles d’ingénieurs et de techniciens formés par ces instituts spécialisés est resté relativement stable. Certaines écoles de formation se sont adaptées au numérique, d’autres proposent des parcours intéressants pour les salariés en reconversion… Mais un fossé important s’est creusé entre l’offre et la demande de développeurs et le marché du travail est devenu très tendu sur les fonctions informatiques”.

Les stratégies des recruteurs pour attirer les développeurs

Pour réussir leurs recrutements malgré ce contexte difficile, les entreprises ont différentes approches. HireFirst identifie trois stratégies, qui correspondent au degré de maturité numérique des sociétés.

Le recruteur utopique recherche le développeur qui correspond parfaitement à toutes ses cases

La première approche consiste à rechercher le développeur parfait. “Le recruteur veut un spécialiste, qui connaît exactement la stack technique de sa future entreprise, un profil “plug and play”. Ce recruteur est optimiste, car il a des chances assez minces de trouver le fameux « moutons à 5 pattes ». Accueillir un profil parfaitement adapté est intéressant, car ce collaborateur pourra très rapidement s’intégrer dans l’environnement technique, avec une prise en main rapide des outils. En revanche, étant donnée l’évolution rapide des technologies, rien n’assure l’adaptation future du collaborateur à de nouveaux langages ou frameworks si un besoin business était nécessaire à ces évolutions”. Cette stratégie de recrutement n’est pas recommandée pour au moins deux raisons : trouver le profil qui correspond parfaitement à ses besoins du moment n’est pas simple, et l’adaptation au changement n’est pas suffisamment évaluée. Le risque : se retrouver, quelques années plus tard, avec des développeurs davantage intéressés par une techno plutôt que par ce que les technos peuvent apporter aux utilisateurs. Ces profils, malgré les tensions sur le marché du travail, s’adaptent peu et peinent à trouver des missions intéressantes.

Le recruteur pragmatique recherche un développeur capable de s’adapter aux spécificités de l’entreprise

La plupart du temps, les recruteurs commencent par rechercher le développeur parfait. Six mois plus tard, puisqu’ils ne l’ont pas trouvé, ils assouplissent leur stratégie pour éviter d’être dépassés par les concurrents. Ils définissent alors les deux ou trois technologies qui constituent le cœur de leur solution et acceptent d’être plus flexibles sur les autres critères. “Un recruteur recevra ainsi un développeur Java qui n’a jamais fait du Spring, car il pourra s’adapter. Ou, il recevra sans problème un développeur front-end qui a éprouvé la technologie Angular, car il sera en mesure d’apprendre le React. Ce recruteur s’autorise à de belles rencontres, même si les profils ne correspondent pas parfaitement au cahier des charges initial”. Ce type de recruteur est de plus en plus fréquent. Cette approche, par les échanges qu’elle initie, permet de mieux apprécier la propension d’apprentissage et d’adaptation du développeur.

Le recruteur moderne recrute un développeur capable de choisir les technologies les plus adaptées à la résolution d’une problématique

Certains recruteurs vont plus loin et ne filtrent plus leurs entretiens en fonction des technos. Ils ont compris que les développeurs talentueux étaient davantage attirés par les champs d’application que par les technologies utilisées. Ces recruteurs préfèrent présenter leurs problématiques et évaluer les développeurs en fonction de leur propension à les résoudre – quelle que soit la technologie sur laquelle ils s’appuient. “Les développeurs attirés par ces approches sont plutôt jeunes mais ils maîtrisent généralement plusieurs langages, ils sont polyglottes. Ce sont des ingénieurs full stack, à l’aise côté back-end et côté front-end. Ils sont curieux, ils se questionnent, ils cherchent les technologies les plus adaptées à des problématiques parfois complexes. Les entretiens entre ces recruteurs et ces profils aboutissent à des discussions très intéressantes”. Dans l’entreprise, ces profils pourront être associés à des architectes, capables de mesurer l’adéquation entre une nouvelle technologie et une stack technique éprouvée, pour permettre l’évolution des systèmes d’information en limitant les risques.

Les développeurs et les entreprises s’adaptent à l’évolution rapide des technologies

Ces différentes stratégies de recrutement aboutiront à des embauches de profils qui n’auront pas les mêmes attentes. Benjamin Mantal rappelle que “les compétences techniques (sans oublier la logique ou l’algorithmie…) restent nécessaires” mais nuance ses propos en insistant “sur l’importance de l’adaptabilité et de la curiosité des développeurs. Les frameworks et les outils changent perpétuellement, ce qui pousse les professionnels à apprendre constamment. Ne pas apprendre, c’est programmer son obsolescence”. 

Les recruteurs, en focalisant leurs attentes sur la capacité des développeurs à résoudre des problèmes, réduisent considérablement les risques d’obsolescence des compétences. Les profils recrutés seront particulièrement attentifs à se former tout au long de leur vie. C’est un point essentiel, étant donnée la rapidité de l’évolution des technologies utilisées. “Certaines entreprises proposent des journées off pour permettre aux développeurs de se former, elles organisent des meetups le soir ou le midi… Des évangélistes convaincus sont invités dans les entreprises pour présenter les potentiels de leur technologie fétiche aux salariés…” Le head of France de HireFirst conclut en insistant sur la progression récente des ESN, dont certaines avaient mauvaise presse par le passé. “Les meilleures ESN tirent leur épingle du jeu en organisant à leur tour ce type d’événement. Elles réussissent alors à convaincre les meilleurs profils et améliorent leurs performances en formant continuellement leurs collaborateurs aux technologies modernes”.

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