Pourquoi certaines marques prennent une longueur d’avance avec l’IA ?

David Bonnamour, Head of IA chez CyberCité, analyse pourquoi l’adoption de l’IA dépend de la capacité des marques à passer à l’action.

CyberCite-BDM-David
Tout savoir sur la bonne implémentation de l'IA avec David Bonnamour. © CyberCité

L’intelligence artificielle bouleverse les pratiques marketing, et certaines marques prennent nettement l’avantage. Mais pourquoi ? Plus que leur taille ou leur notoriété, c’est leur capacité à tester, à itérer et à avancer malgré l’imperfection qui les distingue. Dans cette interview, David Bonnamour, Head of IA chez CyberCité, partage son analyse sur les enjeux, les freins et les opportunités qu’apporte l’IA aux organisations marketing, en soulignant le rôle crucial du passage à l’action.

Picture of David Bonnamour

David Bonnamour, Head of IA

David Bonnamour est Head of IA au sein du groupe CyberCité, où il pilote le Lab Intelligence Artificielle et la transformation IA des expertises métiers comme le SEO, le SEA, le content marketing et les médias sociaux. Il évolue dans l’univers du marketing digital et de l’innovation depuis plus de vingt ans, après avoir dirigé les pôles expertise, technique et R&D de CyberCité en tant que Directeur Général Associé.

On parle beaucoup de l’appétit des marques pour l’IA générative. Dans les faits, comment abordent-elles aujourd’hui ces technologies ?

On sent un vrai mouvement. Les équipes marketing veulent comprendre comment l’IA peut redistribuer les rôles, quels process automatiser, comment conserver l’humanité de la marque tout en gagnant en productivité. C’est souvent très sincère : elles veulent créer des POC, tester des agents IA, identifier jusqu’où on peut aller.
Et dans 100 % des cas, je vois la même réaction : dès les premiers tests, les équipes sont impressionnées. Elles découvrent qu’en quelques minutes, l’IA atteint un niveau de production qui aurait demandé plusieurs jours d’itération humaine.

Alors pourquoi ce passage du test à la mise en ligne provoque-t-il autant de réticences ?

Parce qu’on passe d’une zone sécurisée à un espace public. Et là, les équipes deviennent extrêmement attentives au moindre détail. On voit apparaître des remarques comme :

  • « Ici, il y a une micro-erreur. »
  • « Cette phrase, la marque ne l’aurait pas formulée comme ça. »
  • « Je m’attendais à un rendu plus abouti sur ces assets. »

Ce n’est pas irrationnel : les marques ont une responsabilité, une image, parfois des enjeux juridiques. Mais ce basculement est souvent disproportionné par rapport à la réalité du travail fourni et aux données disponibles.

Vous évoquez des données manquantes. Quels éléments essentiels font défaut dans les POC ?

On retrouve très souvent :

  • le brandbook,
  • la charte éditoriale,
  • des référentiels de ton,
  • des exemples de contenus validés,
  • des photos produits un peu plus grandes que 500 × 500 pixels,
  • ou des guidelines qui n’ont jamais été formalisées.

Avec ça (ou plutôt sans ça), je produis des assets qui atteignent 90 % de conformité avec les attentes de la marque. C’est énorme, parce que sans IA, atteindre ce niveau aurait été impensable, ou en tout cas beaucoup trop coûteux et trop lent.

Et pourtant, ces fameux 10 % restants semblent parfois suffire à stopper totalement un projet.

Oui. Ces 10 % deviennent parfois des « erreurs fatales », alors qu’on parle d’ajustements minimes et entièrement corrigeables.

Mais soyons honnêtes : la plupart du temps, ce n’est pas une question d’exigence technique. C’est une peur culturelle :

  • la peur du commentaire interne : « Ah, c’est de l’IA ? »,
  • la peur du commentaire externe : « IIs automatisent trop. »,
  • la peur que la marque soit perçue comme négligente si un détail échappe à la vigilance.

Cette peur dépasse largement la valeur réelle de ces 10 %.

Certaines marques, pourtant, avancent malgré l’imperfection. Qu’est-ce qui caractérise ces organisations-là ?

Elles ont un état d’esprit très assumé. Elles me disent :

  • « Si on ne teste pas en réel, on n’apprendra jamais. »
  • « Si nous ne faisons pas ce pas maintenant, nos concurrents le feront à notre place. »

Ce sont des équipes qui ont compris que la valeur n’est pas dans la perfection initiale, mais dans la boucle d’itération : on met en ligne, on mesure, on ajuste.
Elles ne s’arrêtent pas à une virgule mal placée ou à une photo pas parfaitement cadrée.

Elles pensent en termes de trajectoire, pas de contrôle absolu.

Beaucoup pensent que les grandes marques sont plus prudentes et les petites plus agiles. Vous constatez cela sur le terrain ?

Pas du tout, c’est un cliché. J’ai vu de tout :

  • de très grands groupes bloquées par une « micro-erreur »,
  • des marques beaucoup plus petites qui disent : « On y va, on corrigera après. »

Ce n’est ni une question de taille, ni de budget, mais de culture interne. Certaines organisations favorisent la décision rapide. D’autres ont construit des strates de validation qui rendent la prise de risque quasiment impossible.

Vous parlez d’une transformation culturelle. En quoi l’IA rebat-elle réellement les cartes dans les organisations marketing ?

L’IA générative force les équipes à abandonner plusieurs réflexes hérités du passé :

  1. Le réflexe du rendu parfait avant diffusion.
  2. Le réflexe du contrôle total, alors que l’IA nécessite du partage de données, de la transparence et de la préparation.
  3. Le réflexe de la linéarité : on produit, on valide, on publie.

L’IA impose l’inverse :

  • on produit vite,
  • on publie,
  • on observe,
  • on corrige.

C’est une transformation professionnelle profonde. Elle change la relation entre les équipes, mais aussi la relation à la création elle-même.

Et quand une marque accepte de franchir le pas malgré les 10 %, que voit-elle comme bénéfices concrets ?

Du gain immédiat. Je partage parfois des captures de performances : ce sont des marques qui n’avaient pas un budget « de malade », qui n’avaient pas toutes les données au départ, et qui ont quand même décidé d’avancer.

Le résultat :

  • de meilleures performances,
  • des cycles plus rapides,
  • un apprentissage réel,
  • une meilleure compréhension de ce que l’IA peut apporter.

C’est exactement ce que les marques prudentes n’obtiennent pas, puisqu’elles restent dans un POC éternellement « prometteur » mais jamais « profitable ».

Pour un responsable marketing qui hésite encore, comment décider du bon moment pour se lancer ?

La question n’est plus « Sommes-nous prêts ? ». La question est : « Avons-nous le courage d’apprendre, même si tout n’est pas parfaitement calé ? »

Parce que l’immobilisme est beaucoup plus risqué qu’une micro-imperfection.
Et parce que les concurrents, eux, n’attendent pas : ils testent, ils avancent, ils optimisent. L’avantage va très clairement aux marques qui osent entrer dans le cycle réel de l’IA, pas à celles qui cherchent le 100 % avant de commencer.

En savoir plus sur CyberCité

Sujets liés :
Publier un commentaire
Ajouter un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Visuel enquête Visuel enquête

Évaluez BDM

Simple ou compliqué, ennuyeux ou captivant... nous avons besoin de vous pour améliorer notre site. Quelques minutes suffisent !

Je donne mon avis