Plainte contre X : un Twitter mutant dont il faut s’enfuir
De plateforme d’ouverture sur le monde à miroir du pire, opinion d’un utilisateur assidu sur ce qu’est devenu X et ce que l’avenir devrait lui réserver.

Réseau social phare des années 2010, Twitter n’est plus, plumé par Elon Musk, et son remplaçant X, agonise noyé dans ce qui se fait de pire, tout en gardant captifs des millions d’utilisateurs incapables de décrocher. Un an après le changement d’image mis en place par le milliardaire américain, peut-on désormais souhaiter autre chose à X que sa fin ?
X, une décharge à ciel ouvert
Je déteste X. Au moins autant que j’aimais Twitter. Ma première inscription date de l’été 2013. J’écrivais des bêtises sur le football, j’avais besoin de les partager et d’en lire d’autres. Bonne ambiance, bulles thématiques, une bonne pointe de sarcasme, d’humour noir et de légèreté, c’était parfait. Des rencontres aussi, d’ici à l’autre bout du monde, traduites dans de longues et fidèles amitiés. Et un formidable outil de veille, au centre de nuits tragiques aux quatre coins du monde, à fébrilement attendre des nouvelles, chercher du soutien ou découvrir l’ampleur des drames qui se nouent partout.
Mais cette plateforme a vécu et j’en ai fait le deuil – ce n’est qu’un réseau social finalement -, seulement pour découvrir une poubelle qui déborde jour après jour de nouvelles immondices. Rien ne va plus sur X, depuis son rachat par Elon Musk en 2022, et encore moins depuis qu’elle s’appelle ainsi et qu’elle se fait le miroir du monde idéal du milliardaire. D’une timeline relativement saine, peuplée d’ami(e)s, de comptes rigolos, officiels et d’actualité – en lien avec mes opinions et mes centres d’intérêt -, je sais désormais qu’il me faut :
- Subir la mise en avant des comptes payants, à la coche bleue, qui bénéficient d’une énorme visibilité et mise en avant, véhiculant souvent des avis contraires en tous points à mes opinions, au sens commun ou à la loi, pour promouvoir qui plus est des idées nauséabondes, ou de l’engagement.
- Subir l’opinion constante des politiques de tous bords, dont l’usage de X est au minimum démesuré, réglant guéguerres et désaccords par posts interposés, partageant tout, en alimentant la machine infernale des commentaires immondes poussés par l’algorithme.
- Subir enfin mes ami(e)s et connaissances indignés, otages comme moi du réseau, ne pouvant parfois se retenir – et j’en suis coupable aussi – de partager avis, posts et idéaux atroces postés par d’autres utilisateurs avec qui tout oppose, pour les critiquer ou les dénoncer, ne servant au final qu’à leur donner plus de visibilité.
- Subir les bots et la publicité non modérée.
Voilà à quoi ressemble l’expérience sur X en 2024 d’un utilisateur dont le compte est depuis plusieurs années maintenant privé, qui ne poste presque plus, bloque à vue, et passe plus de temps à soupirer en scrollant qu’à sourire. La mise en relation de mondes qui ne se rencontraient pas et n’étaient pas censés le faire autrement que le temps d’une vanne a fait de X une arène sans règle, foi ni loi. Tandis que l’intégration des codes de la plateforme par la communication institutionnelle a tué ce qui y restait d’authenticité.
Une application techniquement consternante
L’algorithme, le système d’abonnement et la modération ne sont pas les seules défaillances de X. L’application est dans un état technique déplorable. Outre les différents bugs qui ont touché la plateforme, comme les posts dans les cercles d’amis privés rendus publics avant la suppression de ces derniers, au fur et à mesure de l’ajout ou la suppression de fonctionnalités, d’autres perdurent. Sur mobile, il est par exemple courant de subir un buffering infini en tentant de rafraîchir le fil de contenu. Il est possible de perdre l’accès aux tendances, recherches, notifications, messages privés, comme si vous n’aviez plus de réseau. À de nombreuses reprises, j’ai du forcer l’arrêt de l’application pour me sortir de la boucle de chargement.
L’affichage et le bon fonctionnement des notifications, notamment de messages privés, sont aléatoires, tandis que le système de recommandations sucre les fraises, en proposant très rapidement des tweets vieux de plusieurs années, voire d’une décennie. Le filtre anti-spam masque des messages qui n’en sont pas, laisse passer d’autres malgré des paramètres activés, et non, je ne veux toujours pas savoir ce qu’a dit Jamel Debbouze dans cette fausse interview reprenant les codes de libération, ou de quoi est faussement accusée Elise Lucet dans cet article du Monde frelaté. Ah, et merci robot-madame de garder vos nus dans votre profil, je ne suis pas non plus intéressé par cette opinion politique contraire à mes valeurs que vous commentez.
Un repaire de toxicomanes désabusés
Alors pourquoi ? Pourquoi suis-je encore sur X tout comme certains de mes amis proches ? Premièrement, je ne suis pas un grand utilisateur des réseaux sociaux autrement que dans le contexte professionnel, je dois l’avouer : un compte Instagram plein de fantômes et un profil Facebook perdu dans les couloirs du temps. Twitter a donc été et est toujours, sous X, un lieu de contact pour les ami(e)s et les connaissances. Mais d’autres moyens existent pour communiquer de manière privée, et WhatsApp est par exemple largement adopté. Quant aux associations, petites entités, structures et entreprises, elles n’ont qu’à regarder les impressions de leurs posts pour comprendre qu’elles n’ont plus rien à y espérer que la veille.
Si le deuil de l’ancien Twitter est désormais fait, il n’y a plus qu’une raison qui peut expliquer notre présence, ma présence, sur X : l’addiction et ses vieilles habitudes. Après plus de dix ans sur le réseau, il est difficile de se défaire de petits gestes qui, pourtant, ont un fort impact sur notre santé mentale. Même en en étant conscient, comme pour la cigarette qu’il est facile d’allumer, appuyer sur le petit logo X est d’une simplicité sans nom, notamment pour le hatewatch, la recherche du message ou du clash qui nous fera nous énerver.
Le dilemme n’existe plus. Il faut désormais se désaccoutumer, petit à petit et à force de volonté, en limitant son temps sur l’application, en s’interdisant le scroll infini, en trouvant des méthodes de remplacement, pour finalement quitter définitivement la plateforme d’Elon Musk, ou du moins sa toxicité. Infecté de l’intérieur, comme une ville dystopique, X doit être abandonné et devrait fermer ses portes avant de rester dans les mémoires pour ce qu’il veut devenir : le porte-voix de l’immonde.
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