L’importance grandissante de l’UX design dans les projets web
L’UX s’est imposé en quelques années comme un concept important dans tout projet web, et au-delà encore. Mais qu’est-ce qui se cache derrière ce buzzword ? Nous avons interrogé Olivier Sauvage, fondateur et CEO de Wexperience, à ce sujet.
Le Wex Day (ex Nord Conversion Day) est un évènement important pour toute personne s’intéressant à l’UX et au webmarketing. Le 9 juin prochain, il proposera gratuitement une journée de conférences, d’ateliers et de networking aux professionnels du digital intéressés par le sujet. Pour vous donner envie d’assister à l’évènement, nous avons interrogé un de ses organisateurs : Olivier Sauvage, CEO et fondateur de Wexperience. Il nous explique sa vision de l’évolution de l’UX, sa place actuelle, et celle qu’elle prendra dans les années à venir.
Ces 10 dernières années, le mot UX a été de plus en plus utilisé. Quelle définition en feriez-vous ?
Je trouve que c’est devenu un petit peu compliqué d’en donner une définition. Dans le domaine dans lequel je travaille, le e-commerce, l’UX se confond presque entièrement avec l’expérience client. Mais dans la création d’interfaces digitales, pour accomplir une tâche sur une application métier, c’est de l’ergonomie, par exemple. Là, il n’a rien d’autre à faire que d’essayer d’améliorer la productivité de l’utilisateur tout en épargnant au maximum son énergie et en préservant sa santé.
Mais on parle aussi d’UX pour les objets connectés où c’est à la fois de l’ergonomie – il faut que l’objet soit facile à prendre en main et à utiliser -, et à la fois de l’expérience, dans le sens où l’utilisation de l’objet en lui même participe du produit. C’est l’adage : l’expérience, c’est le produit. Par exemple, lorsque l’iPhone est arrivé sur le marché, il n’était pas qu’un téléphone intelligent, il était une expérience. L’utilisation de l’iPhone, l’expérience qu’on vivait avec, faisaient partie de l’iPhone, car elle procurait du plaisir, de la fierté, donnait la sensation d’avoir du pouvoir, d’appartenir à un club exclusif, etc. Apple était très fort pour inventer ce genre de concept et inspire encore aujourd’hui très fortement tous les designers.
Maintenant on commence même à parler d’UX dans des domaines qui sortent du monde connecté ou digital. L’UX des musées, par exemple, est un sujet très poussé et pose la question de l’optimisation de l’expérience de visite à travers l’expérience du corps en mouvement dans un espace donné. C’est extrêmement compliqué à gérer.
On peut aussi parler d’UX dans les lieux d’accueil public. Comment optimiser au mieux le parcours d’une personne dans un lieu complexe, oppressant parfois, angoissant. Là aussi, les méthodes de l’UX peuvent apporter des solutions.
Donc l’UX, c’est un domaine de plus en plus vaste qui parle de la relation du corps et de l’esprit de l’homme à son environnement et comment il interagit avec lui. Honnêtement s’intéresser à ce sujet n’a rien de nouveau, mais les enseignements tirés du monde digital sont certainement très intéressants pour tout un tas d’autres domaines : l’expérience du patient en hôpital, l’expérience du client d’un hôtel ou d’un parc d’attraction, l’expérience de l’environnement de travail, etc. Tout ça est vraiment très excitant pour les designers !
Est-ce que l’appréhension de ce concept a beaucoup changé selon vous sur cette période ? De quelle manière ?
Oui, son appréhension a beaucoup évolué, mais ce qui est compliqué, comme je l’ai déjà dit, c’est d’en donner une définition unique. Il n’y a pas une UX, il y a des UX. Mais dans le fond, le gros changement, c’est le fait que l’UX a entraîné une nouvelle manière de penser ce qu’on appelle « le produit ». Le produit étant l’objet à travailler et à partir duquel vous allez créer une expérience. Avant (disons il y a 20 ans), on pensait d’abord le produit et on se disait que les utilisateurs allaient s’adapter. Maintenant, en 2020, on pense d’abord besoin utilisateur et on essaie de lui adapter le produit. C’est un changement complet de paradigme dans la façon de concevoir les choses. L’utilisateur final prend une part beaucoup plus importante dans la conception du produit. Il n’est pas relégué à un simple consommateur et son avis compte désormais beaucoup plus qu’auparavant. Cela fait que les ingénieurs, ou les développeurs ou les designers, qui dictaient auparavant les habitudes, doivent aujourd’hui apprendre à d’abord connaître les habitudes et y adapter leur production : objets connectés, design, etc.
Quelle importance a l’UX en 2020 ?
L’UX a désormais une place prépondérante dans la conception de produit comme celle de service. Ou, en tout cas, devrait avoir une place beaucoup plus prépondérante qu’il y a 10 ans encore. Pour moi, la conception centrée utilisateur devrait être la clé de voûte de la conception. Et l’UX Master (titre qui n’existe pas) devrait être le garant de la qualité et du succès du produit, dans une certaine mesure. Dans un projet Web, selon moi, ça devrait être toujours le responsable de l’expérience utilisateur qui devrait avoir le dernier mot sur les développeurs, les designers et les marketeurs.
Bien sûr, ça n’est pas aussi simple que cela, et il y a en permanence une bataille entre les différents corps de métier pour s’approprier et revendiquer la paternité et la responsabilité d’un projet. Mais si on se place du point de vue de l’utilisateur, quand on offre un produit ou un service, ça devrait vraiment être l’UX designer qui devrait porter ce poids. Est-ce que cela sera vraiment le cas dans les années à venir ? Je ne le pense pas, mais du moins je crois que les UX designers prendront de plus en plus d’importance dans les décisions stratégiques des entreprises. Pour ce qui me concerne, c’est plutôt une bonne nouvelle !
Vers quoi s’oriente-t-elle dans les prochains mois / années ? Quelles problématiques phares vont apparaitre ou prendre de l’importance ?
Les méthodes de l’UX ne devraient pas fondamentalement changer dans les années à venir. Cela reste un métier très « manuel », très peu gourmand en outils technologiques à forte valeur ajoutée. Ce qui compte en UX, c’est l’observation de l’humain, fondamentalement, et l’exercice d’une pratique. On est presque, je dirais, dans un métier d’artisanat 😉
En revanche, il va y avoir pléthore de nouveaux sujets à aborder.
- La voix : son succès est indéniable, et on verra d’ailleurs au WEX Day, que j’organise, qu’elle s’immisce partout dans les interfaces et que son usage ira grandissant. La voix résout pas mal de problématiques d’interface et simplifie vraiment les interactions dans de nombreux cas. Grâce aux progrès actuels du Natural Language Processing, on devrait donc la retrouver partout. Et parler à nos objets devrait devenir une véritable habitude naturelle. Il faut donc vraiment suivre les possibilités qu’elle offre et commencer à s’y intéresser fortement.
- L’IA et les algorithmes de personnalisation, en général, vont aussi pas mal changer la donne. Avec la capacité qu’elles ont à offrir des interfaces et des expériences totalement personnalisées individuellement par personne, cela va obliger les UX designers à repenser la manière de concevoir des interfaces. Là où ils pensaient (et ils pensent encore beaucoup comme ça) pour la masse, ils vont devoir penser pour l’individu. C’est à dire au plus petit niveau de granularité de la masse. Cela aura un véritable impact, notamment sur les interfaces dynamiques. On s’en rend déjà bien compte quand on regarde Netflix. Au sein d’une coquille informationnelle identique pour tous les utilisateurs, les contenus sont totalement différents d’un utilisateur à l’autre.
- Le multicanal n’est pas un vain mot. C’est vrai qu’on en parle depuis longtemps et qu’on parle d’expérience sans couture, mais je pense qu’on s’approche de plus en plus aujourd’hui de la nécessité absolue de raisonner en terme de micro-points de contact, de continuité d’expérience, d’homogénéité des interfaces, de mémorisation des parcours utilisateurs… Ça sera très difficile à réaliser… ça l’est déjà… mais les plus grosses marques, les plus grosses entreprises travaillent déjà à ce sujet : comment faire pour que je puisse offrir une seule expérience homogène sans redites et sans anicroches à mes clients du mobile au téléphone, en passant par le magasins, jusqu’à l’acte final d’achat qui peut avoir lieu sur une enceinte intelligente ou même dans le cockpit de ma voiture. Pas facile… mais il faudra bien y arriver.
Et puis, on ne peut jamais prédire le futur, mais étant donné le nombre de technologies émergentes qui sont actuellement à l’œuvre : reconnaissance de gestes, reconnaissances faciales, interfaces haptiques, corporelles, commande par la pensée, etc… on peut s’attendre à ce qu’il y ait pas mal de nouveaux problèmes intéressants à traiter dans les années à venir. J’essaierai de parler de tout ça au WEX Day le 31 mars prochain à Lille.
Quelle place pour l’UX designer aujourd’hui, mais aussi demain ?
J’aimerais lui dire que, bonne nouvelle, il va devenir un rouage essentiel de la création de valeur. Ses compétences et ses spécificités vont se démultiplier. On a déjà tout un corps de spécialistes qui n’existaient pas il y a 5-10 ans : UX Researcher, UI Designer, UX Writer, Vocal UX engineer, etc… on peut tout imaginer. Donc, il risque d’y avoir pas mal de travail pour tout ces gens là.
Le seul point noir, selon moi, est le manque de connaissance des entreprises (les PME et TPE surtout) de ces métiers là et de leur intérêt. Il faut selon moi que les UX Designers fassent un pas vers les mondes qui les ignorent et leurs expliquent avec patience et pédagogie les bienfaits de leur métier. Je trouve que souvent les UX Designers se plaignent de leur manque de considération au sein des projets, mais c’est normal, leur métier est nouveau et leur façon de penser et de traiter les problèmes très original, particulièrement, je pense, par rapport à culture ingénieurale française. L’avenir leur est donc ouvert en grand pourvu qu’ils continuent à évangéliser sur leur métier, ce qui n’est jamais chose simple.
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Pour rebondir sur le point final, c’est vrai que beaucoup de pme/tpe ne sont pas au courant des avantages de l’ux, mais en général c’est plutôt le travail des agences avec qui ces entreprises travaillent qui devrait évangéliser ces concepts.
Sauf que quand on voit la majorité des sites b2b actuel, on se rend bien compte que même en agence digital, beaucoup sont loin derrière en terme de connaissance…
L’UX design doit être le point de départ de tout projet digital et la première question qui doit être posée : quelle expérience souhaite-t-on faire vivre aux utilisateurs ou à la cible. Beaucoup d’agences web ou entreprises sont encore à imaginer que l’UX Design n’est qu’une affaire d’écrans ou de graphisme, hélas.