L’IA rebat les cartes du SEO : entre nouveaux défis et opportunités, le décryptage de Conserto

L’IA transforme profondément le SEO actuellement. En tant qu’expert, quel est votre regard sur cette évolution majeure ?

Depuis que je fais du SEO, j’entends régulièrement cette phrase : « Le SEO, dans deux ans, c’est fini .» Cela fait quinze ans que je fais ce métier, et le référencement naturel est toujours là, mais il est en mutation permanente. Google est depuis longtemps un moteur de réponses plus qu’un moteur de recherche. L’objectif est de fournir directement une réponse claire et riche aux utilisateurs, en améliorant leur expérience en ligne.

Avec ChatGPT, on entre dans une autre dimension. En trois ans, l’outil est passé de 100 à 700 millions d’utilisateurs. C’est énorme !

Ce qui change, c’est que ChatGPT est capable de répondre de façon conversationnelle et personnalisée à des requêtes informationnelles ou commerciales. Là où Google propose une liste de résultats, ChatGPT engage un échange et affine sa réponse en fonction des précisions de l’utilisateur.

Pour la première fois de ma carrière, je vois une vraie menace pour Google.

Google injecte beaucoup d’argent dans Gemini mais, historiquement, l’entreprise n’a jamais réussi à rattraper un usage qui émerge, comme au début des réseaux sociaux avec le lancement de Google+. Je pense qu’ils auront toujours un temps de retard. Et la manne économique de la publicité sur certaines requêtes risque de leur échapper si les utilisateurs passent directement par ChatGPT, qui pourrait demain monétiser ses recommandations via des liens affiliés ou des commissions e-commerce.

Et pour vous, concrètement, quel est l’impact de l’IA dans votre métier de référenceur ?

L’IA change la donne, mais elle n’élimine pas pour autant le SEO. On peut produire du contenu très vite, ce qui constitue une réelle opportunité. Mais si c’est mal fait, cela engendre une certaine fatigue chez les internautes, avec des textes uniformes et sans valeur ajoutée.

Personnellement, quand j’utilise ChatGPT pour produire un contenu, je fais le même effort que si je passais par un rédacteur humain : je rédige un brief éditorial précis avec des éléments de cadrage. Le rendu est rapide, mais l’exigence humaine doit rester la même. Alors, qu’en sera-t-il des stratégies de contenu, sachant qu’une partie des requêtes sera traitée directement par ChatGPT ?

L’enjeu consiste à faire en sorte que l’IA mentionne ou recommande nos clients. C’est ça, la vraie nouveauté.

De nombreuses études sont menées actuellement sur le sujet, et l’on constate que ChatGPT favorise des sources d’autorité, qui sont reconnues, à l’image de Wikipédia, des sites institutionnels, mais aussi des forums comme Reddit. L’effort est en train de se déplacer vers ce que l’on appelle le brand monitoring : il s’agit de surveiller et d’améliorer la façon dont une marque est évoquée sur les différents canaux, sur les chatbots IA, les réseaux sociaux, les forums…

Plus la réputation d’une marque sera positive, plus l’IA aura de chances de la relayer favorablement dans ses réponses.

Cette nouvelle donne implique aussi les directions marketing, car le SEO devient de plus en plus un travail de réputation et de notoriété, en plus de ses traditionnels aspects techniques. Notre métier évolue : on ne fait pas le même SEO en 2025 comme on le faisait il y a 15 ans. Mais dans l’esprit, nos missions restent les mêmes. Ce sont nos expertises qui sont en train de changer.

Comment abordez-vous ces changements au sein de Conserto ?

Au sein de la Fabrique Digitale, qui est l’agence web de Conserto, nous avons beaucoup d’idées, mais aussi une contrainte de bande passante. Nous devons continuer à assurer une qualité de service pour nos clients actuels, qui ne sont pas tous concernés en priorité par ces enjeux. Nous travaillons notamment pour des sites institutionnels, plutôt orientés B2B, comme REMI, le réseau de transport régional du Centre-Val de Loire, ou l’ADEME, l’agence pour la transition écologique. Il s’agit de les accompagner sur des projets de création ou de refonte de site, en particulier autour d’enjeux UX, de design, d’accessibilité et de SEO.

En parallèle de ces missions, nous menons un projet qui consiste à faire un état de l’art autour du SEO et de l’IA.

Concrètement, nous faisons de la veille, nous analysons les pratiques du marché, ce que font nos concurrents, ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, pour emmagasiner le plus de connaissances possible sur le sujet. J’analyse aussi le contexte économique, quels sont les acteurs qui lèvent des fonds par exemple, et dans quelle direction ils vont. Je consacre une demi-journée par semaine à cette tâche.

Conserto reste avant tout une ESN, avec beaucoup de développeurs. Des tests ont été faits pour voir si l’IA pouvait accélérer le développement. Mais les retours montrent que l’IA, dans ce domaine, reste encore au niveau d’un développeur junior. Elle est utile pour effectuer des tâches simples, mais pas suffisamment fiable pour l’intégrer au sein de projets complexes.

Je compare l’IA à un stagiaire : il faut la cadrer, tout vérifier, et la corriger. On ne peut pas encore se reposer dessus en toute autonomie.

Quels outils (SEO, IA…) utilisez-vous au quotidien ?

J’ai déjà testé de nombreux outils. Parmi ceux que j’utilise, je trouve que Make est intéressant. C’est une solution qui permet d’automatiser des séquences avec différents outils (Excel, ChatGPT, etc.). J’utilise beaucoup Semrush, qui reste une valeur sûre, avec des fonctionnalités utiles pour le SEO.

Pour la génération de contenus, ChatGPT est efficace, mais il faut le cadrer avec un bon brief. Pour les visuels, j’ai un usage plus limité : Midjourney est puissant mais peu pratique car je l’utilise via Discord, même s’il existe une version web. En interne, on utilise aussi Copilot.

Je reste curieux, mais je garde mes habitudes avec quelques outils phares.

Comment voyez-vous l’évolution du SEO à plus ou moins long terme ?

L’IA est en train de bouleverser nos usages, pas seulement en SEO. Elle devient un outil conversationnel intégré à la vie quotidienne. Certains jeunes l’utilisent déjà comme un compagnon, ce qui peut poser des questions autant anthropologiques que technologiques.

Pour le SEO, le métier évolue, mais il conserve ses fondamentaux. Il faut comprendre les besoins des internautes, les relier à ce que proposent nos clients, trouver des points de jonction entre les deux, en adaptant nos méthodes et en restant à la fois exigeant et curieux.

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Étienne Collot, Expert SEO

Étienne Collot a démarré sa carrière dans le référencement en 2012. Il a découvert le SEO à travers la rédaction de contenu, puis le netlinking en optimisant le maillage de sites d’entreprises. C’est en 2014 qu’il a « plongé » dans l’aspect technique du SEO, en devenant consultant chez iProspect. Il a ensuite apporté son expertise en référencement naturel chez Vinci immobilier, Search Foresight, et la Fabrique Digitale, l’agence web au sein de l’ESN Conserto, qu’il a rejoint en mars 2022.