L’IA dans la prévision météo et climatique : vers une révolution technologique ?
L’IA promet de révolutionner la prévision météo en accélérant les calculs et en améliorant la précision à l’échelle locale, mais elle pose aussi des défis de fiabilité.
L’intelligence artificielle est en train de transformer de nombreux secteurs et la prévision météorologique n’y fait pas exception. Lors de Big Data & AI et de la conférence intitulée « L’IA pourrait-elle révolutionner la prévision météorologique et climatique : état des lieux et perspectives », Laure Raynaud, chercheuse au Centre National de Recherche Météorologique (CNRM), a exposé comment l’IA peut améliorer la précision des prévisions tout en présentant certains défis. Dans un contexte où la météo est cruciale pour la sécurité des personnes et de nombreux secteurs économiques, alors que les transformations du climat provoquent des phénomènes toujours plus puissants et dangereux, l’IA promet d’apporter des gains en rapidité et en précision.
Les apports de l’IA dans la prévision météorologique : rapidité et précision
La prévision météorologique traditionnelle repose sur des modèles physiques basés sur des équations complexes, qui calculent l’évolution des systèmes météorologiques en prenant en compte plusieurs variables atmosphériques. Ces modèles, bien qu’améliorés au fil des décennies, présentent des limites, notamment en termes de résolution spatiale et temporelle.
L’introduction de l’IA dans ce domaine pourrait changer la donne. Laure Raynaud explique que « l’IA permettrait d’accélérer les calculs de prévision et de les rendre plus précis, en particulier sur des échelles locales. Là où un modèle actuel prend une heure pour effectuer une prévision, l’IA pourrait le faire en quelques secondes ».
Par exemple, l’IA est déjà utilisée pour améliorer la résolution spatiale des prévisions, un des grands défis du domaine. Grâce à des techniques de super résolution, l’IA peut transformer une image météo à basse résolution (1 km par pixel) en une version plus fine, jusqu’à 100 mètres par pixel. Cela permet d’obtenir des prévisions plus précises à l’échelle locale, comme dans les villes, où les phénomènes météorologiques peuvent varier fortement d’un quartier à l’autre.
Les défis à relever : fiabilité, gestion des données et interprétabilité
Cependant, l’intégration de l’IA dans les prévisions météo ne se fait pas sans défi. L’un des principaux obstacles est la « boîte noire » que représente l’IA. Contrairement aux modèles physiques, où chaque processus peut être expliqué par des équations, les modèles d’IA sont souvent difficilement interprétables. Laure Raynaud insiste sur ce point : « Avec nos modèles physiques, même si une prévision se trompe, on peut remonter aux causes de l’erreur. Avec l’IA, cette explicabilité n’est pas encore bien développée. »
Cette absence de transparence est d’autant plus problématique que la météo est un enjeu de sécurité publique. Les prévisions influencent des décisions vitales, comme les alertes aux tempêtes ou aux inondations. Sans une compréhension claire du fonctionnement de l’IA, il est difficile de faire totalement confiance à ces modèles.
En outre, l’IA repose sur des données massives pour fonctionner correctement. Heureusement, comme l’a rappelé Laure Raynaud, « les centres météorologiques possèdent des archives gigantesques de données d’observation et de modélisation, en libre accès », une matière première idéale pour l’entraînement des IA. Mais encore faut-il que ces données soient correctement exploitées et que les infrastructures de calcul soient suffisamment puissantes pour traiter des informations à une résolution toujours plus fine. La puissance de calcul reste donc un verrou important.
Vers une collaboration entre IA et experts du climat
L’avenir de la prévision météorologique semble donc s’orienter vers une hybridation des méthodes. Plutôt que de remplacer totalement les modèles physiques par l’IA, l’idée est de combiner les deux pour en tirer le meilleur parti. Laure Raynaud explique ainsi que l’IA peut être utilisée pour « émuler certaines parties coûteuses en calcul des modèles physiques » ou« représenter des processus que l’on ne comprend pas encore bien ».
Cette approche hybride permettrait de conserver l’aspect explicatif des modèles physiques tout en profitant de la rapidité et de la capacité d’apprentissage de l’IA. Par exemple, des réseaux de neurones peuvent être utilisés pour améliorer la modélisation des phénomènes météorologiques extrêmes, comme les cyclones ou les orages. De tels phénomènes sont souvent mal représentés par les modèles classiques, car ils impliquent une forte variabilité à petite échelle. L’IA, en apprenant à partir de vastes bases de données d’observation, peut affiner ces prévisions.
Dans les années à venir, les chercheurs prévoient également de développer des modèles entièrement basés sur l’IA, capables de générer des prévisions sans recourir aux équations physiques. Cela pourrait rendre les prévisions beaucoup plus rapides et moins coûteuses, mais pose encore la question de la transparence et de la confiance dans ces outils.
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