Censure sur Twitter : des comptes parodiant Nicolas Sarkozy suspendus

EDIT : Après la censure géolocalisée, il semblerait que Twitter bloque un certain nombre de comptes parodiant Nicolas Sarkozy. Qu’il s’agisse de @_nicolassarkozy, @mafranceforte, @fortefrance, @SarkozyCaSuffit, tous ces comptes ont été suspendus. Twitter a reçu un signalement d’usurpation d’identité, du moins pour le compte parodique @_nicolassarkozy, créé il y a plus d’un an. Celui-ci doit modifier son pseudo, son nom, son avatar et son image de fond pour que le compte soit réactivé. Le réseau social spécifie les caractéristiques des comptes parodiques dans ses conditions d’utilisation. Celles-ci stipulent que « les comptes parodiques sont admis, (mais que les informations du profil doivent) rendre évident le fait qu’il s’agisse d’une parodie ». Twitter définit également une norme pour les parodies : « Une personne raisonnable serait-elle consciente qu’il s’agit d’une satire ? ». Quelque soit le compte incriminé, le second degré des tweets était évident, l’argument avancé par le réseau social a donc du mal à tenir debout. Le compte @_nicolassarkozy, en reprenant le nom du Président, ne respectait pas certaines conditions des comptes parodiques ; cependant, sa biographie le stipulait et les tweets publiés étaient clairement humoristiques. Le problème d’usurpation d’identité n’est pas recevable pour les comptes @mafranceforte, @fortefrance et @SarkozyCaSuffit, ceux-ci étant des parodies qui ne reprennent pas directement l’identité du Président. Des associations de défense des libertés comme Internet sans Frontières s’indignent depuis hier de ces décisions. Notons également que le hashtag #SarkoCensure a disparu des trending topics d’un seul coup, après avoir atteint le première place en France. Le signe d’une intervention manuelle des administrateurs de Twitter, qui l’ont remplacé par #NeuillySaMère.

Pour rappel, Twitter a annoncé mettre en place une géocensure il y a quelques jours :

Lorsque vous souhaitez regarder une série américaine en podcast, cela ne se passe pas toujours comme vous le voulez. Vous vous rendez sur le site de la chaîne qui diffuse la série… et parfois un petit message vous informe que vous ne pouvez pas visionner la vidéo, car sa diffusion n’est pas autorisée dans votre pays. La géocensure sera-t-elle bientôt étendue à certains réseaux comme Twitter ? C’est en tout cas ce que le réseau social laisse entendre sur son blog, en tentant de justifier les raisons de cette censure géolocalisée des messages.

Twitter justifie donc son souhait de filtrer un certain nombre de messages par la diversité des lois, selon les pays. En Allemagne et en France par exemple, le contenu pro-nazi est interdit. Le réseau social explique qu’en censurant les messages pour se conformer aux législations, il lui sera plus facile d’entrer dans un certain nombre de pays. Autre justification de cette mesure, le contenu restera accessible « au reste du monde ». Auparavant, un tweet signalé comme contraire à la loi d’un pays ne pouvait être que totalement supprimé. Les réactions hostiles à ce nouveau virage du réseau social ont été nombreuses, ce qui a poussé Twitter à mettre à jour son article pour préciser ses actions.

Concrètement, la censure ne s’appliquera pas de façon préventive (pas de filtrage sur mot-clef par exemple). Cela paraît compliqué lorsqu’on sait que près de 3000 tweets sont publiés chaque seconde. La sanction sera donc effectuée a posteriori, lorsqu’un contenu sera signalé et reconnu comme étant contraire à une loi locale. Si vous vous trouvez dans le pays où le tweet est censuré (vérification via votre IP), une mention « contenu filtré », voire « utilisateur filtré » apparaîtra. Twitter est-il en train d’introduire la suspension locale de compte lorsque du contenu « interdit » sera diffusé ?

Twitter explique que cette décision permettra à du contenu de n’être interdit que dans certains pays. Le réseau social insiste sur le fait que grâce à cette mesure, la censure sera moins étendue qu’auparavant, et qu’il lui sera plus facile de s’introduire dans certains pays. Pourtant, le réseau social expliquait récemment ne pas souhaiter discuter avec les autorités chinoises, pour que son réseau ne soit pas soumis à des règles drastiques de censure dans le pays. Si Twitter avait pris ces mesures avant le printemps arabe, la portée du mouvement sur les réseaux sociaux aurait sans doute été moindre : les messages allant à l’encontre des régimes en place aurait sans doute été censurés. Le problème se pose également aujourd’hui, en Syrie par exemple. Censurer les tweets hostiles au régime syrien ne va sans doute pas dans le sens de la liberté d’expression et de la démocratie. L’étendue du filtrage géographique par Twitter est donc à surveiller de près.

Les réactions des organismes et des pays ont été rapides : Reporters Sans Frontières a réagit dans une lettre ouverte à Jack Dorsey, fondateur de Twitter. L’ONG accuse le réseau de se ranger du côté des censeurs. De son côté, la Thaïlande, tristement connue pour ses mesures restrictives contre Facebook ou YouTube, a accueilli favorablement la nouvelle politique de contrôle de contenu de Twitter. Le pays souhaite contacter prochainement les gérants du réseau social pour étudier de quelle manière ces mesures pourraient être appliquées dans le pays. Des utilisateurs thaïlandais menacent de fermer leurs comptes pour protester. Selon vous, quelle est la meilleure solution ? Assurer une liberté d’expression sans limite, au risque de voir son réseau interdit ou bloqué dans certains pays, ou bien censurer certains messages suivant leur géolocalisation pour favoriser son implantation dans les pays censeurs ?