French Tech : où sont les femmes ?

Quelle place pour les femmes dans le secteur de la tech ? Nous avons interviewé Stephanie Hospital, fondatrice de OneRagtime, sur le sujet.

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Stephanie Hospital fait partie des entrepreneures les plus inspirantes dans le domaine de la tech.

Pouvez-vous présenter votre parcours en quelques lignes ?

Bien sûr ! Je suis diplômée de Grenoble École de Management et j’ai directement fait mes premiers pas dans l’univers de la tech (télécommunication, Internet, média…) chez Arthur Andersen. Après cette belle expérience, j’ai rejoint les rangs d’Orange pour finir par piloter la division Orange Digital, filiale d’Orange dédiée aux activités numériques. Avec mes équipes, j’ai notamment été à l’origine de l’acquisition de Dailymotion et de partenariats majeurs avec Google, Facebook, Wikipédia, Twitter ou encore Microsoft.

Cet univers, mélangeant la tech et l’entrepreneuriat, m’a donné envie de devenir entrepreneure. J’ai lancé OneRagtime, une plateforme de capital-risque investissant dans des start-ups et scale-ups françaises et européennes, du Seed à la Série A.

Aujourd’hui, OneRagtime incarne la nouvelle génération du capital-risque avec sa plateforme technologique unique, sa communauté de plus de 250 investisseurs et corporates, et son modèle hybride, à la fois fonds et plateforme d’investissement. Nous avons accompagné à ce jour plus de 35 pépites tech dans leur croissance à l’image de JellySmack (aujourd’hui une licorne), onoff, +Simple, Make.org, Loopsider, HomaGames, Phantombuster, Choose ou encore Glose (revendu à Medium).

Quels sont les facteurs qui vous ont donné envie d’évoluer dans le secteur de la tech ?

J’ai toujours adoré la tech et tout ce qui tournait autour de l’innovation. J’ai d’ailleurs choisi Grenoble École de Management pour son positionnement très pionnier autour du  management industriel et technologique, et aussi pour ma passion des grands espaces et du ski !

J’ai ensuite eu l’opportunité en conseil de participer aux premières missions de « due diligence » d’investissement dans des sociétés tech ou de gaming. Rejoindre Wanadoo Orange a été pour moi une formidable chance de vivre et d’impulser cette révolution technologique.

Cette année, seules 14 femmes sont co-fondatrices ou CEO d’une start-up lauréate du French Tech Next 40/120. Comment expliquer la sous-représentation des femmes dans le secteur de la tech et du digital, pourtant en plein essor ? La France est-elle en retard par rapport au reste de l’Europe ?

En France, la part globale des équipes féminines ou mixtes ne représente que 21 % des start-ups (source : Baromètre BCG). Au Royaume-Uni, seuls 4 % des fondateurs, parmi les quelque 250 scaleups tech à forte croissance, sont des femmes (source : CodinGame). Les États-Unis, quant à eux, sont un peu en avance avec 28 % de femmes à la tête de start-ups. La France est donc dans la tendance, mais peut aller beaucoup plus loin.

Cette sous-représentation criante s’explique par de nombreux facteurs, mais elle passe notamment par le manque de femmes dans les filières liées au digital, à la technologie ou encore à l’entrepreunariat. Selon une récente étude de Global Contact, la proportion de femmes diplômées travaillant dans le secteur numérique n’atteint que 17 % dans l’Union européenne : nous sommes encore très loin du compte. Mesdames, osez !

Vous faites partie des entrepreneures les plus inspirantes dans le domaine de la tech. Pensez-vous que le secteur a aujourd’hui besoin de modèles féminins pour attirer davantage de femmes ?

Oui, bien sûr ! Les role models sont une partie essentielle du processus pour inspirer les femmes à s’investir dans l’écosystème de la tech. C’est encore plus vrai dans le monde de l’investissement et des VC. Et en France, il existe déjà d’excellentes initiatives à l’image de SISTA. Mettre en avant des femmes, équipes diverses qui réussissent, c’est donner envie, montrer que c’est possible.

Le capital-risque est traditionnellement un jeu de réseau. Dans le « boys’ club » sur lequel notre société s’est construite, les femmes ne connaissent souvent pas les bons investisseurs, ni la personne clé qui peuvent les mettre en relation, ce qui réduit drastiquement leurs opportunités parce qu’elles n’ont pas eu les introductions dont elles avaient besoin. Nous devons accroître les possibilités pour les femmes de mettre le pied dans la porte, de présenter leurs idées. L’utilisation de plateformes de capital-risque comme celle de OneRagtime peut contribuer à promouvoir ce programme, car tout le monde peut postuler et présenter son projet, indépendamment de son identité ou de son origine.

Selon le baromètre SISTA, en 2020, 90 % des fonds levés l’ont été par des équipes masculines. Comment expliquer un tel chiffre ? Quelles sont les mesures prises chez OneRagtime pour favoriser la parité ?

Comme il y a 10 fois moins de femmes qui entreprennent, il y a mécaniquement moins de fonds levés par les équipes mixtes. Il faut encourager les femmes à embrasser des carrières entrepreneuriales, s’assurer que les équipes fondatrices et de management sont mixtes et diverses. Chez OneRagtime par exemple, nous avons 11 nationalités dans l’équipe et un ratio femme/homme de 30 %, même avec une forte composante de profils techs et développement dans nos équipes. 25 % des projets que nous avons financés ont une femme fondatrice ou C-level.

Selon vous, quelles actions peuvent être mises en place pour favoriser la mixité dans le numérique et la tech ? Comment attirer davantage de jeunes filles et futures étudiantes dans ce secteur ?

Inspirer, montrer la voie. Nous devons parler d’entrepreneuriat aux jeunes femmes dès le premier jour, dans les écoles et sur les lieux de travail. Nous devons créer des environnements où les femmes, dans le domaine de la technologie, pourront s’épanouir. Enfin et surtout, nous devons mettre davantage en lumière nos leaders féminins pour inspirer la génération de demain.

Saviez-vous que la moitié des femmes dans la tech quittent leur emploi après 35 ans ? Cela signifie que nous devons non seulement nous concentrer sur l’attraction, mais aussi sur le maintien des femmes dans le monde de la tech en créant des environnements qui les soutiennent de manière durable.

En tant qu’employeurs, nous devons les promouvoir. Nous devons offrir aux femmes des environnements sains et heureux, des espaces dans lesquels elles peuvent et veulent réussir.

Qu’il s’agisse de lieux de travail flexibles, de congés parentaux payés, d’options de garde d’enfants, ou simplement de créer une ambiance et une atmosphère où les femmes se sentent soutenues. Elles doivent savoir qu’elles ont la voie libre pour évoluer et montrer aussi aux hommes que le partage des tâches à la maison et pour les enfants, la charge mentale, doivent être égaux.

Un dernier conseil pour les femmes qui aimeraient se lancer, se reconvertir ou entreprendre dans le domaine de la tech ?

Osez !

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