Facebook : de FarmVille à nos statuts honteux, 20 ans de souvenirs à assumer
Des pokes aux événements « ironiques » : retour sur les tendances plus ou moins passagères sur Facebook, qui célèbre son vingtième anniversaire.
Peut-être est-ce par habitude, par nostalgie ou en raison d’une envie irrépressible d’admirer l’un de nos statuts cryptiques dans l’onglet Souvenir. Les motifs de reconnexion à Facebook, qui souffle sa vingtième bougie ce dimanche 4 février, peuvent varier. Mais les chiffres, eux, sont formels. En juillet 2023, plus de 3 milliards d’utilisateurs continuaient d’errer sporadiquement sur cette plateforme que Le Monde présentait, trois ans après son lancement, comme « un possible concurrent de MySpace ». Et dont on a régulièrement, depuis, pronostiqué le déclin.
Deux décennies après sa création, le réseau social conçu sur les bancs de l’université Harvard – sur la base d’un concept plutôt problématique – n’est, certes, plus à son apogée, mais continue d’afficher des statistiques qui peuvent réjouir Meta, sa désormais maison-mère.
Le réseau social, qui a traversé les époques en dépit de nombreuses controverses, peut également se féliciter d’être à l’origine de tendances plus ou moins passagères. Et que l’on a pu, autrefois, trouver « cools » avant de définitivement les effacer de la mémoire collective. Florilège.

Le poke
Introduite dès 2004, la fonctionnalité poke est rapidement devenue emblématique, bien qu’elle a été interprétée de diverses manières par les utilisateurs. Son principe n’a, d’ailleurs, jamais été clairement explicité par Facebook, comme l’explique Slate. Parfois utilisé comme une marque d’affection, pour faire une blague ou pour saluer un autre utilisateur, le poke a également prêté son nom à une application de messagerie éphémère, conçue pour rivaliser avec Snapchat avant d’être finalement enterrée en 2014. En 2017, Facebook a tenté de raviver l’intérêt pour la fonction, en la plaçant sous l’image de profil de l’utilisateur, comme le relate TechCrunch. Sans grand succès.
Les notifications FarmVille, Mafia Wars et Candy Crush
Invitant à cultiver des aubergines, livrer une guerre de gangs ou écraser des bonbons, les jeux sociaux, qui ont largement popularisé les modèles free-to-play et freemium auprès du grand public, étaient particulièrement prisés sur Facebook, au point d’attirer plusieurs millions de joueurs quotidiennement et de concurrencer des jeux AAA en termes d’audience. Conçus pour être picorés brièvement à chaque connexion, ces casual games ont toutefois connu un déclin progressif, avant de définitivement s’émanciper du réseau social.
Mais en polluant nos notifications et nos fils d’actualité pendant des années, ces titres auront eu le mérite de générer d’importants revenus pour leurs sociétés créatrices, notamment a posteriori. Zynga, studio à l’origine de FarmVille et de Mafia Wars, a été racheté par Take-Two Interactive en 2022 pour 12,7 milliards de dollars. Tandis que King, qui a développé Candy Crush, a été acquis par Activision-Blizzard pour la coquette somme de 5,9 milliards de dollars en 2015.
Les rage comics
Si c’est sur 4Chan que les rage comics sont initialement apparus, ces derniers ont rapidement envahi Facebook. Symbolisés par la célèbre Trollface, ces animations cartoonesques à l’humour souvent douteux ont constitué une des iconographies les plus marquantes du Facebook pré-2012. Dans la galerie de portraits régulièrement représentés, on retrouve le fameux Me Gusta, mais aussi Poker Face, Challenge Accepted ou encore Forever Alone. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le style a mal vieilli.

Les échanges de « Mur à Mur »
Avant l’introduction de la messagerie privée et de la timeline, les utilisateurs avaient pour habitude de converser publiquement, et sans précautions particulières, de « Mur à Mur », soit directement sur les profils des personnes appartenant à leur cercle d’amis. Résultat : en septembre 2012, de nombreux internautes français croient à une faille de sécurité en découvrant que des conversations qu’ils pensaient privées ont été divulguées sur la timeline. Une hypothèse rapidement balayée par Facebook, qui plaide, dans un communiqué, qu’il s’agit « d’anciennes publications, visibles précédemment sur leur profil ».
L’hallucination collective est telle, ce jour-là, qu’elle suscite des réactions jusqu’au sommet de l’État. Arnaud Montebourg, alors ministre du Redressement productif, et Fleur Pellerin, ministre déléguée en charge des PME, exigent que le réseau social fournisse des explications à la CNIL. L’organisme rend ses conclusions quelques jours plus tard, et confirme l’hypothèse formulée par l’accusé : il n’y a pas eu de « bug Facebook ».
Les pages et groupes « drôles »
La moindre activité étant, autrefois, notifiée au cercle d’amis proches, il était commun de rejoindre des groupes ou de suivre des pages pour affirmer son identité. Résultat : il était tout aussi concevable d’accorder sa précieuse mention « J’aime » au dernier film de Tarantino ou à la marque Vans, en se pensant particulièrement edgy et anticonformiste, qu’à des pages « drôles », comme « I’m not drunk I’m just avoiding snipers », « Comité de soutien à la candidature du Roi Heenok aux présidentielles 2012 » ou « Si t’as pas d’amis, va au CDI ».

Les quiz et tests de personnalité
Initialement conçu comme un espace de socialisation virtuelle, Facebook était aussi un lieu où l’on jouait et où l’on se testait, parfois à outrance, en échange de ses données personnelles. « Quel animal es-tu », « Quelle célébrité es-tu »… Les tests de personnalité pullulaient sur la plateforme, et certains acteurs en ont largement tiré parti.
Pour preuve, c’est une application de quiz, en apparence anodine, qui a été utilisée par la société Cambridge Analytica pour collecter les données personnelles de millions d’utilisateurs, afin de les exploiter dans le cadre d’opérations de communication politique. Ce scandale, révélé par The Guardian et The Observer et qui a, par la suite, fait l’objet d’un documentaire diffusé sur Netflix, a contraint Facebook à s’acquitter d’une amende de 725 millions de dollars.
Pour sensibiliser aux risques liés à la divulgation de données personnelles sur Facebook, le réalisateur Jason Zada avait d’ailleurs conçu, dès 2011, une expérience interactive largement relayée sur la plateforme. Baptisée Take this Lollipop, celle-ci invitait l’utilisateur à visionner une vidéo après avoir autorisé l’accès aux informations stockées sur son compte. Ce contenu personnalisé mettait en scène un sociopathe en train de scruter… les données Facebook qu’on venait de gentiment lui léguer.
Les évènements « ironiques »
Plusieurs années après la vague des « apéros géants », organisés sur Facebook et qui étaient, pour la plupart, bien réels au point de préoccuper les autorités, les événements « ironiques » et fictifs ont également connu leur moment de gloire sur la plateforme, comme s’en étonnait VICE en 2017. Ainsi, il était commun, autrefois, d’afficher publiquement sa participation à « Concours de drifts sur le parking de la Foir’fouille de Besançon » ou au « Sondage pour décider de ce qu’on va faire de tout cet oseille ».
