Entretien : Jérôme Monceaux d’Enchanted Tools présente ses robots Mirokaï

Fondateur et PDG d’Enchanted Tools, Jérôme Monceaux est le papa des Mirokaï, des robots d’assistance aux capacités impressionnantes et à la bouille adorable.

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Accompagné de Miroka, Jérôme Monceaux a présenté l'activité d'Enchanted Tools au public du France Digitale Day 2024. © BDM

En marque de France Digitale Day 2024, BDM a rencontré Jérôme Monceaux, CEO d’Enchanted Tools, et son robot d’assistance Miroka. Un robot ultramoderne, qui se meut grâce à un globe roulant, équipé des dernières technologies de perception de l’environnement et d’IA générative, et particulièrement attendrissant !

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Jérôme Monceaux, CEO d'Enchanted Tools

Jérôme Monceaux est fondateur et PDG d’Enchanted Tools, société à l’origine des robots Mirokaï. Avant cela, le Français a notamment participé à la création des robots Nao et Pepper au sein d’Aldebaran. Jérôme Monceaux est également le fondateur et CEO de SPooN.ai, qui s’attache à créer des personnages numériques interactifs et expressifs.

Jérôme Monceaux, vous avez participé à la création de NAO et Pepper chez Aldebaran, deux robots emblématiques. Comment ces expériences ont-elles influencé la création des Mirokaï ?

J’ai en effet piloté le développement technologique, la vision et l’innovation de la structure pendant environ 10 ans. NAO et Pepper ont eu une grande influence sur notre travail avec Mirokaï. Je suis quelqu’un de têtu et il y avait des choses que je voulais accomplir à l’époque chez Aldebaran. Je voulais que les robots soient autonomes, qu’ils puissent aider et générer leur propre comportement. Je pensais pouvoir y parvenir chez Aldebaran, mais cela a pris du temps. Quand je suis parti en 2015, mon idée était de créer un robot qui aide les gens et apporte du merveilleux au quotidien. Depuis 8 ans, je travaille dans ce sens avec une grande accélération ces deux dernières années avec Enchanted Tools.

Avez-vous toujours eu derrière la tête cette idée d’enchantement, d’émerveillement, qu’on retrouve jusqu’en dans le nom Enchanted Tools ?

Oui, c’est le but de ma vie. Je veux que les gens se disent que le monde est fantastique, qu’il y a des raisons d’être curieux et joyeux. Avoir un petit personnage dans le monde réel, qui ne nous oblige pas à être collés à un écran mais partage notre réalité avec un regard émerveillé, est une superbe chose à apporter à l’humanité.

Je veux que les gens se disent que le monde est fantastique.

Vous mettez en avant la simplicité radicale des robots Mirokaï. Comment cela se traduit-il concrètement dans l’expérience utilisateur ?

Les robots sont conçus pour les gens, particulièrement ceux sur le terrain, comme les professionnels de la santé ou des services. Et ces gens ne sont pas forcément entourés de milliards de machines habituellement. Je veux leur offrir un outil qui leur donne des « pouvoirs magiques », quelque chose d’hyper intuitif et simple à utiliser. Par exemple, on a des objets avec des icônes qui permettent de changer le comportement du robot en les utilisant de manière intuitive. Il y en a un qui dit « Ne fais pas de bruit », un autre qui autorise le robot à être rigolo car le contexte le permet…

De la même manière, vous avez opté pour un robot agile, avec sa boule pour se déplacer, qui s’éloigne des robots bipèdes ou quadrupèdes qu’on peut voir…

On est en train de faire un robot pour les vrais gens, dans la vraie vie. Ces gens ont besoin de passer, de monter un escalier… Les robots bipèdes sont bruyants, compliqués, et peuvent être dangereux. Imaginez s’ils vous écrasent le pied ou chute dans des escaliers avec des personnes autour… Les Mirokaï peuvent être bougés manuellement, grâce à leur boule et leur poignée, et c’était un point très important. La boule permet de rendre le robot plus maniable et fluide, tout en réintroduisant une forme de magie grâce à un équilibre qui apporte une certaine élégance.

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Le globe des robots Mirokaï leur offre une certaine aisance et élégance. © Enchanted Tools

À quel type d’environnement les Mirokaï sont-ils adaptés ?

Il est particulièrement adapté aux espaces semi-standardisés, comme les hôpitaux, les hôtels, certains établissements de restauration, avec des sols plats. Il peut franchir des petits obstacles comme des câbles, mais pas des escaliers. De plus, comme il est en équilibre, il peut être poussé facilement sans danger. Le robot peut venir en contact avec du matériel ou avec des gens, il n’y a aucun danger et c’est très simple d’utilisation.

Où sont utilisés actuellement les robots Mirokaï ?

Nous avons déjà livré environ 5 robots à nos clients. Ils sont utilisés dans des domaines comme la recherche, où des chercheurs en robotique ou en autisme explorent leurs propriétés, dans le retail, et surtout dans le secteur de la santé. Nous avons par exemple un partenariat important avec l’AP-HP (assistance publique – hôpitaux de Paris). Et puis, il y a un chiffre en France qui nous touche, nous, directement : en 2040, il y aura plus de personnes à la retraite que de personnes actives. Il va falloir aider toute une génération, avec un besoin de services, d’occupations, comme leur apporter des médicaments, les divertir…

Qu’en est-il de l’intelligence artificielle générative utilisée dans vos robots ?

Dans la robotique, on sait depuis très longtemps qu’il nous faut un espace unique pour projeter ce que le robot comprend du monde. On a d’abord cru que l’espace de projection idéal était un espace en 3D. Mais avec Nao et Pepper, on a compris que l’espace de représentation idéal est le mot. Aujourd’hui, grâce à l’IA générative, le robot écrit en temps réel un « livre du monde » décrivant tout ce qu’il voit et comprend, car le traitement des mots, le traitement sémantique est devenu hyper puissant. Toutes les secondes, Miroka écrit son « livre du monde » : « Je suis Miroka, mon niveau de batterie est de tant, je suis à tel endroit en compagnie de telle personne, il se passe ceci, etc. » Cela permet ensuite au robot de générer des actions à partir de ce texte : dire bonjour, attraper un objet, etc. Il y a parallèlement plusieurs types d’apprentissage : le robot apprend en laboratoire à travers des répétitions, mais il peut aussi apprendre dans l’environnement réel, en mémorisant les réussites ou échecs de ses actions.

Est-ce que l’essor de l’IA générative était nécessaire pour que la robotique franchisse un cap ?

Absolument. Avec Nao et Pepper, nous devions tout coder manuellement. Maintenant, avec l’IA générative, les robots peuvent comprendre et générer du texte, ce qui change tout. L’IA générative a été un énorme accélérateur pour nous, et je pense qu’il y aura un deuxième boom très prochainement avec encore plus d’innovations dans ce domaine. Quand on voit la vitesse à laquelle s’est propagée l’IA générative, avec ChatGPT en exemple le plus évident, on peut s’attendre à ce que ça secoue beaucoup, beaucoup, beaucoup dans les prochains mois !

Passons sur le plan éthique et social. Vous mettez en avant des pratiques éthiques responsables dans le développement technologique. Comment les avez-vous intégrées dans la conception des Mirokaï ?

Mon but est d’apporter du merveilleux et de la beauté dans la vie des gens, que cela stimule leur curiosité, améliore leur quotidien. Cela guide toutes nos décisions éthiques, c’est mon socle le plus puissant. Nous avons travaillé avec des philosophes pour réfléchir à ce que signifie l’altérité dans les artefacts – c’est-à-dire le fait que les machines puissent devenir un autre -, et comment cela peut affecter notre rapport aux machines. Quand on fait un robot humanoïde, cela pose beaucoup de questions éthiques, car on crée un « autre », une altérité. Cela apporte une perturbation dans notre rapport au monde matériel ou au travail, comme cela a été le cas avec la voiture, le téléphone. Mais ce que nous cherchons à faire, c’est apporter de la puissance, de la magie aux gens sur le terrain. Nos machines sont faites pour eux.

Un robot n’est pas qu’une machine utile, c’est une machine qui transforme nos vies positivement.

Sur le plan social, on remarque que les sociétés robotisées sont celles avec un taux de chômage moindre, car cela crée de la croissance. On va plus vite, on a des capacités augmentées. Cela arrive, donc la question à se poser, c’est « quel robot va-t-on utiliser ? » Donc on a le choix : des robots chinois, des robots américains, ou des robots avec les valeurs européennes que l’on connaît, et c’est cela que je défends. Je défends qu’un robot n’est pas qu’une machine utile qui abaisse les coûts, c’est aussi une machine qui transforme notre vie, et positivement.

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Sans leurs oreilles, les Mirokaï mesurent 1,15 mètre. © Enchanted Tools

Quels sont les prochains défis pour Enchanted Tools et ses robots ?

Nous travaillons en écosystème avec plusieurs entreprises pour construire le futur. C’est un effort collectif. C’est vraiment important car on ne gagne jamais seul, on travaille donc à l’échelle écosystémique. Aujourd’hui, nous avons déjà livré des robots à des clients, notamment dans la recherche, le retail et la santé, qui sera probablement le plus gros secteur dans les années à venir, et on en produit tous les jours avec une forte demande. Sans oublier les autres défis du monde, comme le climat… C’est pour cela que l’effort doit être collectif : gagner, c’est faire gagner.

Enchanted Tools disposera à Paris, d’ici la fin de l’année 2024, d’un espace ouvert au public, permettant d’en apprendre plus sur l’IA, la robotique, mais également de rencontrer, en vrai, les Mirokaï et ceux qui les fabriquent.

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