Sur Discord, « les marques doivent construire autour de leur territoire passion »
Jules Palatin a fondé Netcord, agence leader sur Discord. Il accompagne marques et créateurs pour bâtir des communautés authentiques et engagées.
Places publiques du XXIe siècle, les réseaux sociaux ont été investis par les marques, pas seulement pour assurer leur promotion, mais également pour construire des communautés autour de leurs thématiques fortes. Cependant, l’audience se fait plus discrète sur les réseaux algorithmiques traditionnels, alors que d’autres plateformes plus intimistes, comme Discord, deviennent les premiers lieux d’engagement.
Jules Palatin, CEO et fondateur de Netcord
Formé à l’ESSEC Business School, Jules Palatin a fondé, à 18 ans, Netcord, une agence spécialisée dans la création et l’animation de communautés sur Discord. Forte de plus de 130 clients, dont de grands noms tels que le PSG, Louis Vuitton, le GP Explorer ou encore Universal, l’agence se place en leader sur une plateforme un peu particulière…
Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs et lectrices, et revenir sur votre parcours avant la création de Netcord ?
Je m’appelle Jules Palatin, je suis fondateur de Netcord, une agence de création et d’animation de communautés sur Discord. Ce n’est pas un énorme marché, mais aujourd’hui, on en est le leader. On travaille avec des clients comme Louis Vuitton, le GP Explorer, le PSG, Universal… des beaux sujets.
J’ai lancé cette société quand j’avais 18 ans, j’en ai 21 aujourd’hui. À l’époque, j’étais en études de droit que j’ai quittées, puis j’ai repris des études de commerce à l’ESSEC, pendant lesquelles j’ai fondé Netcord. Très vite, je me suis associé au groupe Coudac, un groupe d’agences. Aujourd’hui, Netcord fait partie des cinq agences du groupe, dont je suis aussi associé.
Quel est concrètement le rôle de Netcord pour accompagner marques et créateurs sur Discord ?
On a trois gros volets. Le premier, c’est le volet technique. Il comprend la création de serveurs Discord, qui repose sur les fonctionnalités natives de la plateforme. Et ensuite, il y a tout un pan de développement : on a un pôle tech depuis deux ans dans lequel on a beaucoup investi pour créer des intégrations personnalisées, notamment des bots, qui permettent une expérience unique pour nos clients.
Le deuxième volet, c’est l’animation de communauté. Cela va de la modération classique à la création de rituels, de programmes de gamification, d’expériences engageantes. Par exemple, pour le PSG, on organise des lives avant les gros matches et on a un programme de gamification qui récompense les membres les plus engagés.
Discord a l’avantage d’avoir un engagement très fort entre les membres.
Enfin, le troisième volet, c’est l’activation. Pour certains clients, notamment les créateurs de contenu, il s’agit de réfléchir à comment activer un sponsor dans leur communauté Discord. La plateforme a l’avantage d’avoir un engagement très fort entre les membres, bien plus que sur d’autres réseaux plus algorithmiques. L’idée, c’est de faire en sorte que le partenaire profite à la fois de la visibilité et surtout de l’engagement, tout en générant un retour sur investissement pour les deux parties.
Qu’est-ce qui différencie Discord des autres plateformes sociales comme Instagram ou X ?
Discord, c’est une plateforme communautaire, contrairement aux plateformes algorithmiques classiques. Sur un réseau comme Instagram ou X, la relation entre une marque et son audience est plutôt « one-to-many » : la marque publie et les gens interagissent en retour. Mais les membres interagissent très peu entre eux.
Sur Discord, les échanges sont horizontaux. L’objectif est que les membres parlent entre eux. Il y a bien sûr d’autres plateformes communautaires comme WhatsApp, Slack ou les groupes Facebook, mais Discord a aujourd’hui le meilleur compromis entre fonctionnalités et taille d’audience : presque 600 millions d’utilisateurs dans le monde et des possibilités techniques très poussées grâce aux intégrations.
Êtes-vous d’accord avec l’idée que Discord est un peu comme une maison ou une auberge, alors qu’Instagram ou X seraient des places publiques ?
C’est une image intéressante. Discord, c’est un espace d’échange plus intimiste. Un lieu où les règles sont définies, mais où les portes peuvent être ouvertes.
Il y a des serveurs publics, comme celui du PSG où tout le monde peut entrer. D’autres sont semi-ouverts, sur candidature ou avec certaines conditions. Et certains sont totalement fermés, par exemple réservés aux clients d’une marque. C’est un peu comme une maison, une auberge, un club privé. Ce sont des espaces où l’on peut créer du lien plus fort, plus authentique.
Vous évoquiez également la gamification, via des badges et des récompenses. Quelle est son importance dans l’engagement communautaire ?
C’est fondamental et c’est notamment en ça que Discord fait la différence. Ces systèmes de récompenses n’existent pas forcément sur d’autres plateformes. Et ce n’est pas qu’un système de badges décoratifs : ces récompenses peuvent ouvrir à des avantages concrets.
Les badges permettent de donner un objectif, de maintenir l’intérêt.
Un membre très engagé a besoin de sentir qu’il continue à progresser. Il y a une sorte de cheminement naturel : d’abord, on s’intéresse à une marque, puis on y adhère, puis on rejoint une communauté… Et ensuite ? Il faut une suite logique. Devenir ambassadeur, obtenir un rôle spécifique. Les badges permettent de donner un objectif, de maintenir l’intérêt. C’est un peu une logique méritocratique, mais ces membres très engagés contribuent eux aussi au succès de la marque, c’est donc normal qu’ils soient et se sentent récompensés.
Ça ressemble beaucoup à une mécanique de RPG (jeu de rôle, ndlr), non ?
Totalement. Les jeux vidéo ont compris avant tout le monde ce que c’était qu’une communauté. Discord vient d’ailleurs du monde du gaming. Les premières communautés à l’utiliser, ce sont les gamers. Et aujourd’hui, c’est une structure qui reprend des logiques proches de celles des RPG : progression, quêtes, récompenses, reconnaissance. C’est très efficace.
Avez-vous le sentiment que les gens cherchent à se détourner des réseaux sociaux généralistes pour se retrouver dans des espaces communautaires ?
Clairement, oui. Il n’y a jamais eu autant d’utilisateurs sur les réseaux sociaux et, pourtant, il n’y a jamais eu aussi peu de contenus personnels publiés. Moi, j’étais sur Instagram très tôt, je mettais ma vie entière dessus. Aujourd’hui, je ne poste plus rien, à peine quelques stories.
Les interactions authentiques sont devenues prioritaires.
Les gens se sont rendu compte qu’ils n’en tiraient pas vraiment de bénéfices, sauf ceux dont c’est le métier. L’intérêt, désormais, c’est l’échange, la discussion, et ça passe par des messageries privées, des groupes fermés. C’est ce que j’appelle un peu la « forêt noire » des réseaux sociaux : on sait qu’il y a du monde, mais on ne les voit plus forcément.
Et c’est pour ça que Discord a doublé son nombre d’utilisateurs en trois ans. Les interactions authentiques sont devenues prioritaires, surtout entre personnes partageant des centres d’intérêt ou des problématiques communes.
Est-ce que toutes les marques ont leur place sur Discord ?
Je dirais : tous les « territoires passion » ont leur place sur Discord. C’est un terme que j’ai découvert grâce à mon responsable commercial, et je le trouve très juste.
Une communauté, c’est un groupe de personnes passionnées par une marque, un créateur, un sujet. Donc, si une marque touche à un territoire passion, ça fonctionne. Louis Vuitton, par exemple, c’est la fashion, donc ça marche. Le PSG, c’est le foot, donc évidemment ça marche. Le GP Explorer, c’est la passion pour le contenu, les créateurs, les voitures… Une banque ? Peut-être. La finance peut être une passion pour certains. Mais globalement, ce qui compte, c’est que la marque parle d’un sujet qui suscite de la passion.
En résumé, il vaut mieux parler de son univers que de soi-même ?
Exactement. Louis Vuitton a tout intérêt à devenir le hub principal de discussions autour de la mode, même si ça veut dire que les gens parleront aussi de Gucci. Ce qui compte, c’est d’attirer les passionnés. Créer un espace qui vibre autour d’un sujet plus large que la marque elle-même.
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