Comment devenir Scrum master ou coach agile

Scrum master n’est pas forcément une vocation pour tous. Pour beaucoup, la découverte de ce rôle au sein d’une équipe ou d’une entreprise s’est fait sur un coup du sort. Denis Migot, Bertrand Renou, Séverine Luzeau et Jean-Pierre Lambert, 4 Scrum masters et coachs agiles, expliquent comment ce rôle s’acquière et les compétences qu’il exige.

Un rôle pour certains, une révélation pour d’autres

Pour Denis Migot, il existe autant de chemins pour devenir Scrum master ou coach agile que de personnes qui occupent ces rôles. Tous passent par de la formation, de la lecture, des discussions, de l’écoute et de la pratique. Toutefois, le hasard occupe aussi une part importante. « On devient souvent Scrum master par défaut « parce qu’il en fallait un » et que l’on s’est proposé, voire parce que l’on a été désigné pour tenir le rôle, indique Jean-Pierre Lambert. Souvent aussi, c’est en temps partiel car l’entreprise ne comprend pas bien la valeur du Scrum master. Évidemment dans ces conditions, être Scrum master peut n’être qu’un passage temporaire, mais pour d’autres c’est l’occasion de se découvrir une vocation inattendue. »

C’est exactement l’histoire de Séverine Luzeau, développeuse Java, qui endosse aujourd’hui le rôle de Srum master pour son équipe. « Pour ma part, tout est parti d’une formation Certified Scrum Master que m’a imposée mon employeur, explique-t-elle. Je n’avais aucune idée de ce que c’était, et j’ai eu une révélation ! J’étais développeur Java, pas franchement passionnée par la technique, et en revenant, j’ai demandé le rôle de Scrum Master. Je me suis peu à peu détachée du développement pour devenir Scrum Master à plein temps. Et comme mon équipe était pionnière en la matière, je suis allée aider d’autres équipes petit à petit, et c’est ainsi qu’a commencé mon rôle de coaching. »

Pour Séverine Luzeau, une formation est indispensable pour bien comprendre le rôle. « Ensuite, beaucoup de travail de veille, de recherche. Et de l’expérience, essayer des choses, animer beaucoup« . L’expérience sur le tas est en effet largement plébiscitée par les autres Scrum masters. « Il y a la possibilité de passer les certifications Scrum.org ou Scrum Alliance. Mon avis est de commencer par plusieurs missions de Scrum master pour prendre de l’expérience« , abonde Bertrand Renou.

Humilité, écoute, bienveillance

Quand on demande aux Scrum masters les qualités requises pour tenir ce rôle au sein de l’équipe agile, l’humilité est celle qui se démarque le plus. « Il est important de réussir à prendre de la hauteur ou du recul et à adopter un point de vue systémique. Finalement, il faut aimer aider les autres plutôt qu’être soi-même dans l’action. Au final tout cela forme un cocktail un peu particulier« , indique Jean-Pierre Lambert.

« Être un bon Scrum Master nécessite, à mon sens, un bon équilibre entre connaissances théoriques et pragmatisme, renchérit Denis Migot. Un Scrum Master confronte tous les jours ce qu’il a appris à la réalité du terrain. C’est l’occasion de se rendre compte qu’il n’existe pas de vérité, que ce qui fonctionne avec une équipe ne fonctionne pas forcément avec une autre. Il est en effet important de ne pas tomber dans le dogme : Scrum a des limites, Scrum n’a pas réponse à tout et le but de l’équipe n’est pas d’appliquer Scrum. »

Parmi les autres softskills requis on retrouve :

• l’écoute
• l’ouverture d’esprit
• la curiosité
• l’observation
• la bienveillance
• savoir laisser faire les autres

Pour Séverine Luzeau, des compétences techniques sont également un plus. « Scrum Master est un rôle, pas un poste, il faut donc avoir des compétences techniques. Il faut  savoir ce qu’est la vie d’une équipe de développeur, avoir le vocabulaire, connaître le cycle de vie du produit.  Ensuite, il y a un gros aspect management, il faut donc une appétence pour l’humain. J’ajouterais de la rigueur et de l’organisation, de l’empathie, de la créativité et la foi dans ce que l’on fait. »

Enfin, la veille est également un élément central dans toute carrière de Scrum master. « Il y a énormément à apprendre, et des nouveaux mouvements qui se créent en permanence, déclare Jean-Pierre Lambert. Il faut à la fois connaître ses classiques et être ouvert aux nouveautés. Mais plus important encore : se focaliser sur l’état d’esprit. Ce n’est pas la méthode ni les outils qui comptent mais bien comment on les utilise. Toujours garder en tête pourquoi on fait ou veut faire telle ou telle chose ! »

Un besoin fort pour un rôle mal compris

Si pour beaucoup le rôle de Scrum master est assigné par un concours de circonstances, c’est parce que la demande est très forte au sein des entreprises. « Le rôle de Scrum Master est un rôle porteur sur le marché mais exigeant, précise Denis Migot. Exigeant car on ne s’improvise pas Scrum Master et car il est nécessaire de se former en permanence. »

Ce fort besoin exprimé par le marché de l’emploi peut toutefois porter préjudice au concept d’agilité dans l’entreprise. « Le rôle de Scrum master est souvent mal compris et souvent des entreprises utilisent « agile » comme mot clé à la mode, alors qu’elles cherchent en réalité des rôles hybrides ou à côté de la plaque, affirme Jean-Pierre Lambert. « L’agilité est en effet à la mode en ce moment. De nouvelles équipes et entreprises se lancent et ont besoin d’accompagnement« , abonde Bertrand Renou.

Séverine Luzeau voit « deux écoles. Soit les entreprises capitalisent sur un encadrement interne, et choisissent de recruter des Scrum masters pour en faire des managers. Soit elles pensent que le coaching suffira et recrutent des consultants en coaching pour amener les équipes vers Scrum. La finalité du job de Scrum master, c’est de devenir inutile. Dans ce cas, difficile de se faire embaucher sur ce poste. »