Cybersécurité : les compétences tactiques et stratégiques à maîtriser
Nous avons interrogé David Vauclair, directeur de l’institut ILERI, qui forme aux métiers de la cybersécurité. Il nous présente les compétences nécessaires pour évoluer dans ce domaine.
David Vauclair, directeur de l’institut ILERI
David Vauclair est professeur de géopolitique et le directeur de l’ILERI (Institut Libre des Relations Internationales et des Sciences Politiques), fondé par le Prix Nobel de la Paix René Cassin en 1948. Situé à Lyon et Paris, l’ILERI offre des programmes de Masters et MSc spécialisés en cyberespace, relations internationales et gestion de crises. Il est diplômé de McGill University, Sciences Po Paris, UPEC et University College London. Il a publié une monographie sur les religions abrahamiques (Eyrolles), qui a été traduit en espagnol et récemment republié en édition de poche.
Pour quelles raisons les organisations ont-elles de plus en plus besoin de talents pour les aider à assurer leur sécurité informatique ?
Parce que désormais toute organisation fonctionne et interagit constamment avec le numérique, parce qu’en France une entreprise subit une cyberattaque toutes les 15 secondes en moyenne, parce que 60 % des PME attaquées dans le monde ferment leurs portes dans les 6 mois qui suivent l’attaque. Il faut donc des responsables qualifiés qui, dans les organisations, savent comprendre, analyser et adresser ces questions, qui sont capables d’évaluer des solutions en phase avec la stratégie des organisations, et qui pourront présenter des choix clairs, intelligibles et pertinents, afin de faciliter les prises de décision. Ces experts doivent être en mesure de s’adresser tant aux techniciens qu’aux donneurs d’ordre, avec efficacité et précision.
Quelles sont les principales compétences à maîtriser pour faire carrière dans la cybersécurité, selon vous ?
Il faut avant tout être intéressé par le sujet, et, sans être ingénieur, être technophile. Vous devez savoir :
- analyser et gérer les risques,
- connaître et comprendre les normes de sécurité, l’architecture et les stratégies,
- protéger des informations sensibles par la cryptographie,
- anticiper les menaces, prévenir et gérer les crises,
- et mettre en place une veille efficace.
Pour évoluer dans la cybersécurité, il faut aussi disposer de notions claires en réseaux, algorithmie, programmation, gestion des identités et des accès.
Et du côté des soft skills ?
À l’ILERI, nous formons de jeunes professionnels à des compétences tant tactiques que stratégiques. C’est ce qui explique qu’au niveau du savoir-être, nous mettons en avant les qualités humaines suivantes :
- la capacité analytique et de recherche,
- l’intégrité et le leadership,
- mais aussi les capacités relationnelles.
Dans le cyber, nous travaillons ensemble : il faut donc pouvoir collaborer, résoudre d’éventuels conflits, arbitrer, concilier, guider et se faire guider, tout en accompagnant ses collaborateurs et sa hiérarchie au changement.
Pour quelle(s) raison(s) les qualités humaines sont-elles si nécessaires pour réussir dans la cybersécurité ?
La machine n’est qu’un outil, et derrière chaque programme, il y a un (ou des) programmeur(s). Sans compréhension de l’humain et de ce qui fait sa complexité, comment comprendre et agir ? De plus, le « geek » devant son ordinateur est souvent un mythe et surtout un technicien pur. Nous formons des cadres, des spécialistes, qui font le pont entre l’informaticien ou l’ingénieur, et le donneur d’ordre, le chef d’entreprise ou le client à la recherche d’une solution. Nous formons des stratèges et des facilitateurs.
Comment l’ILERI permet-elle aux futurs talents d’acquérir ces compétences clés ?
Nous proposons une pédagogie à la fois classique et innovante, avec de nombreuses passerelles entre le monde purement académique et l’entreprise, avec des formateurs qui sont à la fois des acteurs et des penseurs du cyberespace, avec des militaires, des hackers, des théoriciens et des praticiens. Nos programmes sont organisés pour donner à nos étudiants le cadre juridique, économique, politique et technologique, qui leur permettra de s’adapter sans trop de difficultés aux différents défis et crises que peuvent rencontrer des États ou des entreprises, d’en saisir les opportunités tout en limitant leurs effets néfastes, pour mieux préparer le monde de demain.
Deux cursus sont disponibles :
- Un MSc en relations Internationales et cyberespace : pour vous donner toutes les compétences pour pouvoir exercer dans le management, la stratégie et le conseil, savoir anticiper et influencer les environnements réglementaires pour contribuer à garantir l’éthique, le développement responsable et durable dans les solutions technologiques, tout en assurant la performance et l’efficacité des organisations.
- Un MSc défense, cybersécurité et gestion des risques : pour vous offrir des instruments de cartographie des risques, des jeux sérieux (serious games) et des simulations de crise, afin de vous permettre de mieux comprendre ce que représentent les guerres et les conflits économiques.
Dans les 2 cas, nous souhaitons que nos apprenants soient à la pointe des enjeux cyber mondiaux et qu’ils puissent détecter, analyser et traiter avec efficacité les informations en temps de veille comme en temps de crise.
En quoi l’alternance est-elle une formule idéale pour monter rapidement en compétences dans la cybersécurité ?
Les avantages sont nombreux : pouvoir se former en étant salarié et considéré comme tel permet à la fois d’éprouver les théories étudiées à la pratique parfois rude du monde professionnel, mais aussi de se constituer une solide expérience, et de s’insérer d’autant plus aisément dans un cadre entrepreneurial.
Nos Ilériens bénéficient donc d’un terrain précieux, où ils peuvent affiner et compléter ce qu’ils acquièrent en classe avec leurs professeurs et formateurs. On voit ainsi en un an des débutants intéressés (parfois surnommés « noobs ») devenir d’excellents généralistes et, selon les expériences et les tuteurs, parfois des experts dans le domaine de leur alternance.
Pour les organismes d’accueil, cela représente également un réel atout, car les alternants portent un regard neuf sur les processus et les métiers. Leur esprit d’analyse et leur recul amènent souvent des idées nouvelles que l’on n’a pas forcément, lorsque l’on est « le nez dans le guidon ».
Quels sont les différents types de métiers que les futurs talents pourront exercer à l’issue de leur formation ?
Nos apprenants sont jusqu’à présent très demandés et c’est toujours avec joie que je constate qu’ils trouvent rapidement des postes à la hauteur de leurs ambitions, souvent dans les zones hautes des grilles de rémunérations.
On les retrouve dans les Directions des Systèmes d’Information (DSI), dans les équipes des Responsables de la Sécurité des Systèmes d’Information (RSSI), ou des Délégués à la Protection des Données (DPO), dans la prospective, la Business Intelligence (BI), le Cyber Threat Intelligence (CTI), en tant qu’analyste ou expert dans les métiers de la diplomatie, de la défense, ou de l’intelligence économique et stratégique, la prévention ou la gestion des crises.
Ils peuvent aussi évoluer au sein d’organismes publics ou privés français chargés de la défense et de la sécurité, les organisations internationales ou non gouvernementales traitant de la sécurité dans tous ses aspects militaires et non militaires et, bien sûr, en tant que consultant en entreprise et cabinet de conseil.