Le community management a 20 ans : retour sur une révolution

En 20 ans, le community management est devenu incontournable. Michael Illouz, acteur et témoin de son essor, retrace son évolution et ses grands enjeux.

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D'un bricolage d'enthousiastes à une discipline structurée, le community management a bien changé en 20 ans ! © barsrsind - stock.adobe.com

Il y a vingt ans, les réseaux sociaux n’étaient qu’un terrain vierge. Et le community management, un métier qui n’existait pas encore. Aujourd’hui, chaque marque, chaque média, chaque influenceur cherche à construire sa présence en ligne à travers des contenus, des trends, des campagnes social media… parfois jusqu’à saturation !

À l’occasion des 20 ans du community management, Michael Illouz, fondateur de l’agence Conceptory, auteur de Revolution Story et témoin actif de cette transformation, nous éclaire sur ces deux décennies d’évolution, entre montée en puissance de la data, explosion créative et quête de sens.

Des premiers community managers qui n’en portent pas encore le nom

Lorsque les premiers réseaux sociaux apparaissent au début des années 2000, ils ne ressemblent en rien aux plateformes que l’on connaît aujourd’hui. Le community management, lui, ne porte pas encore ce nom. « Tout a été créé de A à Z », rappelle Michael Illouz, « avant, il n’y avait rien ». Les profils sont divers, les usages encore balbutiants. Mais qui sont les premiers community managers ? Peut-être ceux qui se sont occupés des « premiers clients : surtout des boutiques, Chevignon, Timberland, Kickers et même Tati, qui voulaient créer des pages Facebook, annoncer des évènements pour venir en magasin, pour communiquer sur les soldes… »

Pas un profil type, mais une multitude de curiosités.

Il y avait déjà l’idée de récolter de la data, surtout par l’intermédiaire d’applications de jeux « de mémoire, des tests de personnalité, des quiz… C’était très concouriste comme démarche ». Et puis, on trouvait aussi « des passionnés de blogging, des gens issus des forums, qui aimaient écrire, faire de la veille, et qui ont naturellement migré vers Facebook, YouTube, etc. Il n’y avait donc pas un profil type, mais une multitude de curiosités, avec des avant-gardistes, des gamers, chacun ayant envie d’explorer ce nouveau monde ».

Professionnalisation, diversification, industrialisation ?

Les plateformes se sont ensuite multipliées, tout comme les possibilités et les formats. « On a commencé avec uniquement du texte. Puis sont arrivés les photos, les GIF, les vidéos. On a vu du format long, du format court, des trends… » En parallèle, l’activité s’est professionnalisée et diversifiée. La notion même de community manager recouvre aujourd’hui une grande diversité de profils. « Derrière ce mot-là se cachent plusieurs métiers », explique Michael Illouz. Selon lui, trois piliers dominent : la gestion de communauté, les social ads et la création de contenu. « Certains profils sont hybrides, d’autres sont experts de l’un de ces domaines. »

La publication de contenu est devenue quant à elle massive, presque ininterrompue. Et ce flux continu se remarque sur toutes les plateformes. « Même sur LinkedIn, réseau plus corporate, tout le monde prend la parole sur tout. Avec cette immensité de contenu, on se pose une question centrale : comment émerger ? » . L’automatisation, portée notamment par l’IA, accentue cette tension. « Il y a en plus un côté industrialisation, comme des robots, où tout le monde a les mêmes images et les mêmes textes », note Michael Illouz. « Comme les emailings qu’on reçoit en growth hacking : tout se ressemble. »

L’importance du sens et de l’intelligence humaine

Alors qu’on parle désormais beaucoup, dans le community management, « du fameux combat de la data, des KPI, du ROI », et de tout ce qui est immédiatement traçable, l’enjeu ne se limite pas à la performance. Car il faut bien se démarquer. « Celui qui fait un pas de côté, qui est disruptif, qui est original, qui va justement prendre à contre-courant ce qui se fait, c’est celui qui va avoir toutes les chances de tirer son épingle du jeu. » La créativité, à condition qu’elle soit sincère, reste selon Michael Illouz la clé de voûte du métier. « Ce que j’aime, ce sont les marques capables d’être des community builders, affirme-t-il. Pas seulement avec un message descendant du genre ‘je suis la marque et je fais des posts promotionnels’. »

Il cite en exemple des marques connues pour leur ton décalé, comme Oasis ou Burger King, mais aussi des projets plus modestes, avec l’idée d’un positionnement autour d’une thématique. « Avec une marque de pâte à tartiner, on crée une communauté liée à la gourmandise, avec des tutos pour faire de la cuisine, et beaucoup de sincérité. » D’autres lancent leur marque après avoir ressenti une demande : « Kelly Massol, avec Les secrets de Loly (marque de soins capillaires, ndlr), a écouté ce qui se disait sur le social media. Elle a répondu à un besoin. »

Du brand content au brand utility

Les effets de mode, quant à eux, peuvent piéger les marques dans leur communication. Une blague trop répétée, une participation tardive à une trend peuvent nuire à leur image. « Si tu joues sur une trend une semaine après, parce que tu as mis quatre jours à te rendre compte qu’elle existe, franchement… » Au contraire, le rebond, « le détournement d’une actualité ou newsjacking, ça peut être très drôle ». Michael Illouz met en garde : la seule reprise opportuniste d’un format populaire ne suffit plus. « On attend d’une marque qu’elle ait du sens. Avant, on parlait de brand content. Aujourd’hui, on parle de brand utility. »

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Les marques ruinent parfois la fête sur les réseaux sociaux ! © @alexkrokus

Les meilleurs profils sont souvent out of the box.

C’est aussi pour cette raison que le secteur reste ouvert aux trajectoires atypiques. « Les meilleurs profils sont souvent out of the box, ne sortant pas forcément d’études en community management. » Il rappelle que dans la publicité aussi, certains pionniers venaient d’autres mondes. « Je pense à Thierry Ardisson, Dominique Farrugia ou Alain Chabat… Ces mecs-là, ils ne sont pas de la pub à la base. » Mais ils ont su apporter une touche différente et unique. Néanmoins, au quotidien, une part de technicité reste nécessaire : « Il faut quand même se nourrir de quelques notions » pour être un bon CM, comme savoir « animer les réseaux sociaux d’une marque avec un calendrier, une ligne éditoriale, faire les ads, trier ce qui va de ce qui ne va pas… »

En vingt ans, le community management est passé d’un bricolage d’enthousiastes à une discipline structurée. Pourtant, tout reste à écrire. « C’est un métier qui doit se réinventer. Il y a encore beaucoup de place pour faire beaucoup de choses. »

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