Informatique quantique : définition et usages avec Olivier Ezratty

Qu’est-ce que l’informatique quantique ? Et quelles sont ses applications concrètes ? Éclairage avec Olivier Ezratty, qui abordera cette thématique lors du France Digital Day 2023.

L'ordinateur quantique pourrait servir à faire des calculs pour simuler la matière ou résoudre des problèmes très complexes. © BPawesome - stock.adobe.com

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Olivier Ezratty

Olivier Ezratty conseille les entreprises et l’État autour des technologies quantiques. Auteur, conférencier et enseignant, il est notamment l’auteur de l’ouvrage « Understanding Quantum Technologies » et l’animateur de deux podcasts sur les technologies quantiques avec Fanny Bouton. Il a démarré en 1985 comme ingénieur logiciel puis responsable de R&D chez Sogitec (une filiale du groupe Dassault Aviation), puis exercé diverses fonctions marketing chez Microsoft en France entre 1990 et 2005, dont CMO et Directeur des Relations Développeurs.

On parle de plus en plus de quantique et d’informatique quantique, mais de quoi s’agit-il concrètement ?

La physique quantique est un champ entier de la physique qui a été découvert au 20ème siècle, qui a valu quelques dizaines de prix Nobel à des personnes comme Heisenberg, Schrödinger, Einstein et d’autres. Il faut savoir que tout le numérique d’aujourd’hui utilise le quantique. Par exemple, toutes les technologies à base de transistors ou de fibres optiques, c’est du quantique. Elles utilisent des principes qui ont été découverts il y a plus d’un siècle, et qui relèvent, pour faire simple, de l’interaction entre la lumière et la matière.

Les ordinateurs quantiques utilisent trois principes relativement nouveaux et contre-intuitifs : la superposition des états, l’intrication qui sert à faire du calcul rapide et la maîtrise et le contrôle à l’échelle individuelle des objets quantiques, c’est-à-dire des électrons, des photons et des atomes.

Quels sont les principaux avantages de l’informatique quantique par rapport à l’informatique traditionnelle ?

L’idée, c’est que l’ordinateur quantique est censé permettre de faire des calculs plus rapidement. Dans certains cas, il s’agit de calculs inaccessibles pour des machines classiques. Le problème, c’est que ça ne fonctionne pas encore. C’est une promesse. Pour y arriver, il y a des obstacles scientifiques et technologiques extrêmement importants à lever. Et on est encore à mi-chemin.

Par exemple, l’ordinateur quantique pourrait servir à :

  • Résoudre des problèmes d’optimisation combinatoire très complexes, notamment dans la finance.
  • Faire des calculs pour simuler la matière elle-même, afin d’inventer de nouveaux matériaux ou procédés chimiques avec des applications potentielles dans la santé, dans l’énergie, etc.
  • Aller plus loin dans le domaine de l’IA et du machine learning.

Quelles sont les principales applications pratiques de l’informatique quantique que nous pourrions voir à l’avenir ?

L’entreprise Pasqal, par exemple, a réalisé une étude de cas qui associe du calcul classique à du calcul quantique avec une branche du Crédit Agricole, pour réaliser ce qu’on appelle de la détection du défaut de crédit. L’objectif était d’identifier le plus tôt possible des clients qui risquent de ne pas rembourser leurs emprunts, à partir de données réelles.

L’autre exemple souvent mis en avant, mais qui nécessite des ressources qui n’existent pas encore, c’est l’optimisation des portefeuilles d’investissement pour limiter les pertes et augmenter les gains. Ce sont des problèmes très complexes, avec beaucoup de variables et de combinatoire.

Dans le domaine de la chimie, ces outils pourraient être mis à la disposition des chimistes ou des biologistes pour faire des découvertes, comme l’invention de procédés chimiques pour capter le CO2 ou produire de l’engrais plus efficacement.

Ce qui est assez paradoxal dans le cas du calcul quantique, c’est que tout le monde considère qu’il n’y a pas assez de cas d’usages, mais les machines pour les réaliser ne sont pas encore là. Des prototypes existent, mais il y a encore beaucoup de boulot.

Pourquoi l’informatique quantique devient-elle est un sujet important ?

Il y a plein de raisons à cela. La première, c’est l’appât du gain, mais pas forcément au sens financier du terme. Le calcul quantique, le jour où ça marchera, peut apporter tellement de bénéfices dans différents métiers que l’on veut y croire. La seconde, c’est que tous les États, de la Chine aux États-Unis en passant par l’Europe ont lancé leur plan quantique pour récupérer leur part du gâteau. Il y a un autre point qui est que, au-delà de l’ordinateur quantique, il existe d’autres usages des technologies quantiques, notamment au niveau militaire.

Le quantique a la caractéristique d’être lointain, incertain, compliqué. Et grâce au fait qu’il y ait une incertitude scientifique, on peut, peut-être, regagner une part d’autonomie. Une capacité à être indépendant, à maîtriser la technologie. Alors, c’est plus compliqué que ça, évidemment, parce que, il faut faire la part des choses entre le risque scientifique et la capacité scientifique de tel ou tel pays, ou telle entreprise, à être capable de créer ce genre de machines.

On a donc, d’un côté, la promesse, puis les stratégies de gouvernements qui alimentent financièrement cette mécanique. Les projets pilotes développés en France sont quasiment tous subventionnés par l’État. On pourrait le critiquer, mais ça a du sens dans la mesure où, en général, l’investissement public est assez adapté quand il s’agit d’un sujet très long terme. On compense les déficiences de marché dans la capacité d’investir sur le long terme par la force du public. Mais l’investissement réalisé dans le quantique est moindre que dans l’IA ou d’autres domaines.

Cette technologie sera-t-elle un jour accessible au grand public ?

Disons que l’usage sera indirect. Le résultat pourrait être visible via un front-end, une application qui utilise le calcul quantique. Mais ce ne sera probablement pas utilisé pour du calcul en temps réel, mais plutôt pour des calculs très complexes. Le quantique, ce sera la partie virtuelle que l’on ne voit pas, avant que cela devienne réel.

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