La loi européenne sur le copyright menace l’intégrité du web

La nouvelle semble avoir secoué les médias anglosaxons sans que cela se propage par-delà les mers. Pourtant, la mise à jour de la loi européenne sur le copyright pourrait bien toucher l’ensemble des internautes dans le monde.

Le mois dernier, le Conseil de l’UE et le Parlement Européen ont en effet rediscuté certains articles de la loi sur le copyright proposée par la Commission Européenne, dans le cadre d’une réforme sur les droits d’auteurs sur le marché numérique. Il en est ressorti de nouvelles prérogatives très inquiétantes pour l’essence même d’Internet.

Vers la mise en place de machine de censure sur les sites web ?

La réforme du droit d’auteur sur le marché numérique était censée régler un bon nombres de problématiques sur le sujet. D’après Julia Reda, eurodéputée membre du Parti Pirate, certaines révisions d’articles semblent pourtant créer encore de nombreux débats. En effet, l’article 11 et l’article 13 de la nouvelle loi menaceraient Internet et sa philosophie libertaire.

Parmi les directives adoptées, celle d’imposer aux plateformes Internet l’intégration de machines de censure. Les plateformes seront ainsi tenues de surveiller tous les téléchargements des utilisateurs afin de détecter toute violation des droits d’auteurs. Un comble pour les initiateurs du RGPD, comme le souligne Julia Reda : « Alors que dans le cas du RGPD, les institutions de l’UE ont apporté de nombreux changements contre les efforts concertés de lobbying des grands groupes, dans la réforme du droit d’auteur, ils sont sur le point de leur donner exactement ce qu’ils veulent. »

Dans les faits, l’UE n’imposera pas directement l’implémentation de ces machines de surveillance (appelés filtres automatique de téléchargement). Toutefois, les plateformes Internet seront tenues pour responsables des contenus publiés par les utilisateurs, et donc des éventuelles violations des droits d’auteurs. Pour se dédouaner de cette responsabilité, les plateformes devront donc montrer leur bonne foi en prouvant qu’elles ont tout fait pour éviter ces violations en… déployant lesdits « filtres automatique de téléchargement ».

Ainsi, des plateformes hébergeurs comme Wikipédia, GitHub, Reddit et consorts sont directement menacées par cette loi, notamment imposée par la France, l’Espagne et le Portugal en octobre 2017.

Plus de 28 taxes différentes sur les liens des éditeurs de presse

Autre aberration de cette nouvelle mise à jour, celle concernant le copyright et le droit d’auteur des éditeurs de presse. La Commission souhaite en effet générer des revenus pour les éditeurs européens, en leur permettant de facturer des plateformes Internet pour l’affichage d’extraits de leur contenu. Les cibles indiquées sont Google, Facebook, Twitter et Pinterest, qui utilisent de tels extraits dans le cadre d’un lien vers des articles d’actualité.

La « Link Tax » se définit comme suit : « Toute personne utilisant des extraits de contenu en ligne journalistique doit d’abord obtenir une licence de l’éditeur. » Ce nouveau droit pour les éditeurs s’appliquerait 20 ans après la publication.

Julia Reda illustre les détails de cette loi plus longuement dans un autre article. Par exemple : « Les prévisualisations automatiques de liens générées par les utilisateurs lors d’un partage (affichage du titre, d’une vignette et d’un court extrait) nécessitent une licence, ainsi que toute personne analysant le contenu des actualités sur le Web comme les agrégateurs de news, les services de surveillance média et les vérifications de prestations de service. »

Mais le gouvernement Allemand souhaite ajouter une nouvelle directive : celle de ne pas faire de distinguo entre les différents types d’extraits de contenu tombant sous le coup de la taxe. Pour Berlin, n’importe quel extrait de publication de presse devrait être concerné. Une décision qui ne fait pas l’unanimité, loin de là. Pour pallier ce désaccord, le Parlement Européen a invité chaque pays à décider pour son propre cas, ce qui entre en totale contradiction avec la volonté d’unifier la législation et de créer un « marché numérique unique » au sein de l’UE.

Pour résumer, cette nouvelle directive pourrait enfermer en elle 28 obligations différentes. Internet n’ayant pas de frontière, les plateformes seraient donc tenues par défaut de se conformer à la loi la plus stricte.

Les prochains votes le 20 et 21 juin

Les articles de la réforme du droit d’auteur ont été validés par les membres du Conseil de l’UE. C’est désormais au Parlement Européen de statuer sur cette mise à jour de la législation, et il semblerait que ce ne soit pas dans la volonté de ses membres de vouloir empêcher l’adoption de ces articles. Pire, Julia Reda accuse l’eurodéputé allemand Axel Voss de vouloir rendre cette loi davantage liberticide en « élargissant le champ d’application de la proposition de censure à toutes les plateformes Web, dont l’objectif est de donner accès au contenu protégé mis en ligne par les utilisateurs et d’optimiser ce contenu. »

La membre du Parti Pirate invite tout internaute en désaccord avec cette nouvelle législation à le faire savoir en appelant les eurodéputés de leur circonscription. La Fondation Mozilla, profondément opposée à cette réforme, propose ainsi de joindre un député à cette adresse.

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