Décryptage : quelles évolutions pour le Big Data en 2020 ?
Manon Philippe, responsable des conférences de Big Data Paris, dresse dans cette interview un panorama des évolutions passées et à venir dans le secteur du Big Data.
En 10 ans, le Big Data a pris une place importante dans les entreprises et dans les considérations des professionnels de la tech. Quel chemin a été parcouru ? Quelles sont les tendances pour cette année ? Dans le cadre du salon Big Data Paris, qui va connaître sa neuvième édition en 2020 et dont nous avons l’honneur d’être partenaires, la responsable des conférences Manon Philippe revient pour nous sur les évolutions du secteur.
On parle énormément de Big Data depuis plusieurs années. Mais quelles réalités recouvre actuellement ce terme ? Quels secteurs, métiers, industries sont concernés ?
Dix ans après ses débuts, le marché du Big Data est en perpétuelle croissance, avec un taux de 12% enregistré en 2019. Lorsque l’on évoquait le Big Data à ses débuts, on pensait le terme sous le prisme technique et technologique : les 3V (volume, vitesse et variété), comment traiter techniquement d’immenses quantités de données hétérogènes afin d’en retirer de la valeur, comment industrialiser des projets Big Data. Aujourd’hui, les plus importantes barrières technologiques ont été franchies bien que la pérennité des outils adoptés et les choix d’architecture restent des prérequis indispensables pour traiter la donnée. On constate que le Big Data n’est plus l’apanage d’entreprises technologiques qui se sont construites autour de la donnée (Uber, Netflix…), mais s’intègre désormais dans la stratégie de tous les types d’entreprises et dans tous les secteurs (industrie, service, grande distribution, web, énergie, banque, télécoms…). Du côté des métiers, il y a une réelle volonté et une forte motivation à démocratiser l’accès à la donnée au sein des différents services afin qu’ils puissent en retirer de la valeur : le Big data ne concerne plus seulement les experts techniques (data scientists, data architects, DSI, etc.), mais aussi les responsables marketing, responsables de la transformation digitale, de l’innovation…
Avec 18 000 visiteurs et 250 conférences, Big Data Paris est représentatif de l’écosystème Big Data européen. Quels types d’acteurs cet écosystème regroupe-t-il ?
Cette année nous attendons effectivement 18 000 participants. Pour vous donner une idée, la première édition qui a eu lieu en 2012 accueillait 700 participants. L’événement a donc grandi avec l’écosystème Big Data. Des acteurs représentant tous les secteurs touchés par la donnée (banque, retail, web, tourisme, industrie…) seront présents. Comme évoqué précédemment, les profils sont variés et vont de l’expert technique de la data aux métiers impactés par la donnée : CDO, data scientists, responsable BI, directions IT (DSI, responsable informatique), direction métiers, marketing, service R&D et innovations.
Le thème de 2020 est celui de la culture de la donnée. Pourquoi avoir choisi ce thème ? Que signifie-t-il ?
La neuvième édition du congrès Big Data Paris s’ouvre dans un contexte de remise en question des modèles de développement big data en place, laissant apparaître des questionnements de fond de la part des porteurs de projets big data et de leurs partenaires sur le « mieux faire ». En 2020, le Big Data entre dans l’âge de raison. Le passage à l’industrialisation des premiers cas d’usage et l’arrivée à maturité de la filière Big Data entraînent les organisations dans une toute nouvelle ère : alors que pendant plusieurs années le défi premier des entreprises portait sur la manière d’apprivoiser et de créer de la valeur autour de leur donnée, cette ère post-industrielle recentre les décideurs sur des défis humains, organisationnels et de confiance. Le thème de 2020 est donc celui de l’humain, de l’acculturation. Pourquoi ? Car aujourd’hui, le facteur humain semble être le principal frein à la réussite et à la mise en place de projets Big Data. Les entreprises ne butent plus sur la technique mais sur l’acculturation, la collaboration entre profils métiers et experts techniques. 90% des entreprises indiquent que les difficultés rencontrées dans leurs projets data ne viennent pas de la technologie. Pour ces organisations, les difficultés dans les projets de données et de transformation digitale sont venues des personnes, des processus et de la culture.
Il s’agit déjà de la neuvième édition de l’évènement. Quel regard portez-vous sur les évolutions du secteur depuis la première édition ?
On constate tous que le Big Data offre aujourd’hui plusieurs visages et converge avec les nouvelles technologies de rupture pour répondre à de nouvelles utilisations de la donnée : machine learning, intelligence artificielle, IOT, streaming, edge computing, cloud computing. De manière indéniable, les entreprises ont progressé dans la mise en place du Big data et ont pu acquérir une expertise technique. Mais se lancer dans un projet Big Data ne requiert plus seulement une maîtrise technologique mais implique une réorganisation profonde. Ce qui ouvre la réflexion autour de l’humain et de l’organisationnel.
Quelles grandes tendances voyez-vous se dessiner cette année dans le domaine de la data ?
Parmi celles que je retiens, citons :
- Des usages à portée de tous dans les transports, la santé, le e-commerce, avec des fournisseurs de services digitaux natifs comme Uber, Airbnb ou Blablacar.
- Des applications dans le marketing, la finance, ou la logistique qui feraient économiser 1200 milliards de dollars aux entreprises utilisatrices d’après Forrester.
- Une plus grande réflexion autour de l’humain, de la gouvernance comme évoqué précédemment.
- Une réflexion autour des aspects éthiques de la donnée : Le Big Data recouvre aujourd’hui une réalité sociétale, avec tous les débats autour de l’éthique, de la qualité de la donnée, que l’utilisation massive de la donnée a généré.
- D’un point de vue technologique le cloud a opté pour des modèles d’applications en conteneurs, Hadoop est de plus en plus remis en question. Le stockage et le traitement à la périphérie ont le vent en poupe.
Quels seront les temps forts de cette édition ?
Pour aborder les questions d’éthique et d’utilisation responsable de la donnée, le lanceur d’alerte dans l’affaire Cambridge Analytica Christopher Wylie viendra donner son témoignage. Un débat sur la géopolitique du Big Data et notamment la place de l’Europe sur l’échiquier international aura lieu le même jour. Il fera intervenir l’entrepreneur et Digital Champion Gilles Babinet et Charles Thibout, chercheur associé chez Iris. Une table ronde réunissant Suez, la Société Générale et le BCP répondra à la thématique de la gouvernance des données.
La scientifique Aurélie Jean prendra la parole sur le sujet suivant : Big Data et IA, reconstruire la confiance.
Enfin, des retours d’expériences marketing, métiers et experts auront lieu tout au long de ces deux jours permettant aux entreprises de partager leurs best practices sur des sujets allant de la qualité des données, à l’anonymisation des données, aux usages du big data dans le marketing ou encore dans l’industrie 4.0.
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