AI Overviews : de nouveaux réflexes de lecture qui transforment le SEO ?
En déployant les AI Overviews, Google modifie profondément la manière dont les internautes lisent et interagissent avec les résultats de recherche, note une récente étude.

Depuis le déploiement des AI Overviews dans les résultats de recherche de Google, de nombreuses études ont tenté d’en mesurer l’impact sur le trafic organique et le référencement naturel. Mais jusqu’ici, très peu d’analyses s’étaient penchées sur l’usage réel fait par les internautes de ces résumés générés par IA. Une étude publiée par l’équipe de Growth Memo propose une première exploration UX, à partir de 70 sessions utilisateurs filmées et annotées.
L’objectif de cette analyse est de comprendre comment les internautes interagissent concrètement avec les AI Overviews (que nous abrègerons parfois en « AIO »). Ce travail met en lumière des comportements nouveaux, des réflexes de lecture inédits et des implications directes pour les éditeurs, les spécialistes du SEO et les designers de l’expérience en ligne, à quelques semaines d’un probable déploiement européen.
Comment a été menée cette première étude UX sur les AI Overviews
L’étude menée par Growth Memo repose sur une méthodologie qualitative, centrée sur l’observation du comportement d’utilisateurs et d’utilisatrices face aux AI Overviews. Le protocole combine plusieurs techniques issues de la recherche UX : sessions de type think-aloud, enregistrements d’écran, mouvements de souris, scrolls, clics, ainsi qu’une captation des interactions visuelles. Au total, 70 participants ont réalisé huit tâches de recherche, pour environ 400 sessions exploitables.
Le but affiché était de mieux comprendre comment les internautes réagissent à la présence des AIO dans les résultats de recherche. Contrairement aux nombreuses études basées sur des analyses de trafic ou de positions SEO, celle-ci se concentre uniquement sur les usages observés à l’écran, dans des conditions réelles. Les résultats obtenus permettent de dresser un premier tableau du comportement des internautes face à cette nouvelle interface de réponse et offrent des éléments concrets pour mesurer l’évolution des habitudes de navigation dans le cadre de la recherche en ligne.
Une chute de l’engagement, mais surtout un nouveau réflexe de lecture
L’un des constats majeurs de l’étude concerne l’engagement des utilisateurs et utilisatrices face aux résultats de recherche qui contiennent un AI Overview. Les chercheurs observent une baisse notable des clics sur les liens traditionnels, en particulier sur desktop. Lorsqu’un AIO est affiché, les participant(e)s ont tendance à rester focalisés sur la réponse fournie par l’IA, sans chercher à consulter d’autres sources proposées plus bas dans la page.
L’étude souligne aussi que l’attention des internautes se concentre presque exclusivement sur le tiers supérieur du bloc généré par l’IA. Si la majorité des participant(e)s cliquent sur le bouton permettant de dérouler un résumé IA, ils sont peu nombreux à scroller jusqu’en bas du AIO. Ceux qui vont au-delà, vers les résultats organiques classiques, font partie de la minorité. Ce comportement est décrit comme une « fixation sur le haut de la réponse », qui réduit mécaniquement les opportunités de clics vers les sites tiers.
Lorsque des clics interviennent, ils se dirigent majoritairement vers des plateformes communautaires comme Reddit ou YouTube, note l’étude, jugées plus personnelles ou crédibles selon le contexte de recherche. À l’inverse, les liens pointant vers des éditeurs de contenus plus traditionnels sont nettement moins sollicités.
Ce changement d’engagement ne se traduit pas seulement par une baisse du nombre de clics, mais aussi par une transformation qualitative de la manière dont l’information est perçue : l’AIO est souvent considéré comme une réponse complète en soi, suffisante pour clore la recherche.
Comment les utilisateurs interagissent avec les AIO : scroll, œil, souris, intention
Une passivité étonnante
L’analyse précise des comportements visuels et moteurs des participant(e)s met en évidence des habitudes spécifiques lorsqu’un AI Overview est affiché. L’un des premiers éléments relevés par l’étude est la quasi-absence de scroll. Dans la majorité des sessions, les utilisateurs et utilisatrices ne font défiler ni le contenu de l’AIO ni le reste de la page. L’interaction se limite souvent à ce qui est visible immédiatement à l’écran.
Les mouvements de souris, lorsqu’ils existent, confirment cette passivité : peu de survols, peu de tests de liens, peu d’exploration. Les participant(e)s lisent, puis s’arrêtent. L’étude qualifie ce comportement de « lecture frontale ». Les internautes prennent acte de la réponse, mais n’adoptent pas les gestes habituels de validation ou de vérification qu’on peut observer avec les résultats classiques.
Vouloir, mais ne pas faire
Ce constat est particulièrement marqué sur mobile, où l’expérience semble encore plus figée. La navigation y est plus rapide, les gestes plus courts et la confiance accordée à l’IA semble plus spontanée. À l’inverse, sur desktop, certains internautes se montrent plus enclins à explorer les sources citées, mais cela reste marginal dans l’ensemble du panel.
L’étude met également en évidence une asymétrie entre perception et action. Plusieurs participant(e)s déclarent vouloir « vérifier les sources » ou « en savoir plus », sans pour autant cliquer. Le comportement observé trahit une forme d’autosuffisance perçue de la réponse de l’IA, qui modifie en profondeur l’intention de recherche.
Des différences générationnelles
Chez les utilisateurs et utilisatrices les plus jeunes, notamment sur mobile, l’AI Overview est souvent perçu comme une réponse suffisante. Les chercheurs observent une forte confiance accordée au résumé généré par l’IA, avec peu de remise en question ou de recherche complémentaire. Ce segment d’internautes adopte une posture de lecture rapide, directe, sans exploration approfondie des liens affichés.
À l’inverse, les plus âgés manifestent davantage de prudence. Certains cherchent explicitement à remonter à la source ou à consulter les résultats organiques traditionnels, en particulier sur desktop. Leur comportement s’apparente davantage à un usage « pré-AIO », avec des gestes de validation ou de comparaison plus présents, même si cela reste minoritaire dans l’échantillon global.
Quelles conséquences pour les pros du SEO, de l’UX et du contenu ?
Au-delà de la simple observation des comportements, l’étude propose plusieurs pistes de réflexion pour les professionnels du référencement, de l’expérience utilisateur et de la création de contenu. Les résultats suggèrent une transformation profonde de la façon dont l’attention est captée et distribuée dans les pages de résultats.
La reprise d’une « réponse définitive »
D’abord, le positionnement classique perd de son poids. Être en première position organique ne garantit plus d’être vu ou cliqué lorsque l’AIO est présent. L’attention se concentre en amont, dans la zone haute du bloc IA, qui capte l’essentiel de la lecture et, le plus souvent, la totalité de l’interaction.
Ensuite, la notion de « réponse définitive » s’impose. L’AI Overview fonctionne comme une synthèse immédiate, perçue comme fiable et suffisante, en particulier sur mobile. Dans ce contexte, le rôle des éditeurs de contenu évolue. Il ne s’agit plus seulement d’attirer du trafic, mais aussi (surtout ?) de contribuer à des réponses générées, en espérant être cité.
Synthétiser la valeur ajoutée
Les chercheurs estiment ainsi que la crédibilité perçue, l’alignement avec les requêtes et la clarté du contenu deviennent des leviers clés. Les marques, les sites éditoriaux ou les experts qui parviennent à apparaître dans les sources de l’AIO peuvent capter une forme d’attention, même sans clic.
Enfin, l’UX de l’information doit être repensée, note l’étude. Face à des internautes qui scrollent moins, cliquent peu et lisent vite, les contenus doivent s’adapter à une logique de réponse synthétique, tout en conservant leur valeur ajoutée. L’objectif n’est plus seulement d’être trouvé, mais d’être repris, compris et, si possible, estimé par les modèles de génération automatique.